Karim ben Khelifa, 38 ans. Photojournalistes depuis 15 ans, nombreuses publications dans la presse internationale, vit entre New York et la France.
Michel Philippot: Face à la « crise » de la presse, à la politique frileuse des journaux quant à investir dans les reportages, quelles furent vos réflexions ?
Karim ben Khelifa: Il nous est apparu évident que le problème n’était plus de savoir où diffuser mais de trouver une réponse à la question comment, où trouver un financement pour produire des reportages. Des reportages qui demandent du temps, dans la préparation comme dans la réalisation. L’investigation demande des moyens financiers. Pour ce faire, avec Tina Ahrens ex picture editor de Geo Allemagne aux US, Fanuel Wever un « Open Innovation Evangelist » qui a fait ses preuves chez IBM et d’autres grosses entreprises américaines et moi-même nous avons crées EMPHAS.IS ce qui veut dire en grec « mise en lumière ».
M.P.: Mais encore.
Karim ben Khelifa: C’est un site qui met en communication un photographe et un public, un contact qui tient un peu de l’engagement. L’idée est de monétiser l’expérience plutôt que le produit que le produit finit, je parle bien sur d’un reportage photographique.
M.P.: Précisez.
Karim ben Khelifa: Un journal propose, « impose » un produit que l’on reçoit comme tel, comme tous les médias, excepté le choix d’achat ou le zapping, le lecteur , le téléspectateur est en position passive. Nous tablons sur l’interaction et l’établissement d’une communauté. Communauté autour d’un sujet et du photographe qui va le prendre en charge, le réaliser (exemple: le portfolio de Carolyn Drake, photographe vivant à Istanbul). D’une manière générale les photographes qui viennent vers nous ont déjà proposé leur sujet à un média qui les ont éconduits dans leur démarche. Le public via notre plateforme se voit proposer ces mêmes reportages va être sollicité à la réalisation de ceux-ci. Nous ne sommes qu’une réaction à la fuite des journaux devant leurs responsabilités d’information.
M.P.: Comment cela se passe-t-il pour l’internaute qui veut participer à la réalisation d’un reportage ?
Karim ben Khelifa: Il met10$ minimum sur le sujet choisi, il accède au processus du reportage, à son avancement et donne son point de vue, son opinion sur ce qui lui est proposé par le photographe. C’est une véritable interaction qui s’établi dans ces conditions. Par exemple, si vous êtes intéressé par les Droits de l’Homme, vous serez directement en contact avec le photographe lui apportant éventuellement vos connaissances, ce qui dynamisera obligatoirement le sujet. C’est un plus pour tout le monde. Pour moi qui ai la chance d’être un photographe reconnu avec de nombreuses parutions dans de nombreux journaux, je ne connais pas mon « public ». Ce n’est plus le cas avec EMPHAS.IS. Nous attendons d’autre part l’ouverture du marché par les communautés d’intérêt, ce qui dépasse le photojournalisme. Pour reprendre l’exemple des Droits de l’Homme, toutes les Organisations concernées par le problème vont, pourrons agréger la proposition de reportage sur leur site ce qui entraînera un élargissement de la communauté, le bénéfice sera réciproque.
M.P.: Comment, par qui sont sélectionnés les reportages ?
Karim ben Khelifa: Par un aréopage de personnes aux parcours divers mais qui ont toutes un immense intérêt à la photo, un grosse trentaine. cf: http://emphas.is/web/ourboardofreviewers.De ce large groupe, seuls qques uns sont, selon les affinités par rapport au sujet appelés à se prononcer et en suivent son déroulement.
M.P.:Une fois le reportage réalisé, que fait le photographe de son matériel ?
Karim ben Khelifa: Il appartint à 100% au photographe il en dispose comme il le désire. Il peut le vendre aux journaux…
M.P.: Depuis quand la plateforme EMPHAS.IS fonctionne-t-elle ? Et quels sont ses résultats ?
Karim ben Khelifa: Nous existons depuis mars 2011, ce qui était une théorie il y a six mois est maintenant une réalité. Nous avons réussis à recueillir 113.000 $ pour soutenir le Photojournalisme , 9 projets. Certains sont finis et sont dans le circuit, d’autres en cours par exemple :
Tomas van Houtryve. Survivance du communisme au Laos. Fini.
Joa Pinto. Opération Condor. Fini.
Laura Al Tantawi. A l’ombre des Pyramides, sujet qui va monter sur la plateforme…
M.P: Combien de personnes travaillent pour cette plateforme et comment vous financez vous ?
Karim ben Khelifa: Nous sommes 7 travailler plein temps dont les 3 membres fondateurs. Quant au financement, il vient des 15% que nous gardons sur les fonds collectés.