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Justine Tjallinks : Le mystère de la réincarnation 

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Justine Tjallinks est une des principales photographes de la scène émergente hollandaise. Elle fut directrice artistique de la version néerlandaise de « L’Officiel ». Installée à Amsterdam où elle a étudié au « Fashion Institude », elle a grandi à Warnsveld dans l’Est de la Hollande. Se laissant aller à ses désirs esthétiques, la photographe invente un monde d’images où elle revisite certains standards de la peinture flamande mais aussi Jean-Baptiste-Siméon ou Jean-Baptiste Greuze, tout en cultivant dans ses prises des émotions étranges.

La photographe était dans sa jeunesse une grande rêveuse. Mais au moment où généralement les songes s’estompent, les siens ont évolué et elle a éprouvé le besoin de les mettre en images. Hyper douée, l’artiste réussit brillamment ses études. Mais la seule matière qui la motivait restait celle qui importait le moins à son cercle familial : les arts plastiques. C’est pourquoi très vite Justine Tjallinks a voulu quitter son village pour Amsterdam (en rêvant de passer ses vacances à New York) : « Toutes les pièces de mes rêves s’ajusteraient dans l’endroit où j’irais. Mais ce ne fut pas le cas », rappelle celle qui en moins de dix ans a pourtant trouvé sa place de créatrice. L’artiste ne cache pas ses ambitions : « Je peux me réjouir d’avoir accompli des choses et j’espère en réaliser encore. Mais je crois que je peux dire que je suis maintenant où je voulais être lorsque j’étais enfant. »

Influencée par Tim Walker, Erwin Olaf, Vivianne Sassen, Kasia Bielska et Jill Greenberg, l’artiste joue avec la lumière sans chercher à imiter des styles mais en cultivant son propre langage. Elle met les apparences en porte à faux à travers des images de rêve de durée illimitée. Elle fonde son travail sur la phrase de Baudelaire dans « L’art romantique : Le beau est toujours bizarre ». L’œuvre est une combinaison de beaucoup d’influences photographiques. Les beaux-arts, l’art contemporain, la mode et les accessoires de beauté y ont partie prenante. Justine Tjallinks opère presque toujours de manière conceptuelle afin d’ajouter une signification supplémentaire à ses photographies.

La photographe cultive une fascination pour l’imperfection – néanmoins toujours absente de ses photos. Elle affectionne les petits ratés de nature. Par exemple l’albinisme. « Avez-vous déjà vu un crocodile ou un lion albinos ? Je ne crois pas qu’il y ait quelque chose de plus beau », dit celle qui a été honorée de pouvoir photographier la belle femme albinos hollandaise Miriam (qu’on peut voir dans ses séries « Nude »).

Justine Tjallinks dut travailler de nuit et les week-ends à ses photographies en installant un atelier improvisé dans sa salle de séjour. Optant désormais pour un temps partiel dans son travail de directrice artistique, la créatrice espère pouvoir vivre uniquement dès l’année prochaine de son travail artistique. En surgit un monde étrange où tout ce qui a disparu au fil du temps semble revenir. Fin et commencement, dehors et dedans coexistent, comme superposés et présents en une même vibration où la nudité devient le point de concentration.
Dans l’œuvre tout commence ou recommence, inlassablement. L’intime est parfois blanc et (presque) nu mais parfois aussi une discrète monstruosité ironique le souligne, comme si l’artiste entretenait avec son travail une immense vénération et une formidable dérision.
Chacun des regardeurs est soudain poursuivi par le fantôme de l’intimité féminine même si l’artiste ne l’exhibe pas : elle se contente de la caresser. Louvoie une forme de volupté, là où le pubis demeure en aporie. Car si depuis Courbet l’entre jambe est devenu la question centrale de l’origine du monde, Justine Tjallinks l’évite : ce qui était pertinent il y a plus de cent ans ne l’est plus aujourd’hui. L’épreuve de la suggestion permet de retrouver l’essence même de la féminité. L’évidence de l’ « objet » érotique est renvoyée à un ordre poétique et protecteur que rappelle un quatrain d’une autre artiste (Andelu) : « Cache ta cloche / le muguet arrive. / Le clochard ne dort jamais loin / De ton intimité promise ».

« Rotterdam Contemporary », Courtesy of the Sophie Maree Gallery, Cruise Terminal Rotterdam, février 2016, « Life Framer », Grand series winner, Menier Gallery London, Janvier 2016, « Photo London », Lens Culture Finalist.

Single Image Category, 19-22 avril 2016

http://justinetjallinksphotography.com

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