La série Ukraine : ceux de Sotnia n°5 de Juliette Robert a été sélectionnée par Frédérique Founès (co-fondatrice de Signatures, maison de photographes) lors des lectures de portfolios organisées dans le cadre de la Parenthèse Freelens les 15 et 16 novembre 2014 à la Gaité Lyrique.
Je suis arrivée place Maïdan à la fin du mois de janvier, les affrontements rue Grushevsky, quelques centaines de mètres plus loin, étaient finis et un cessez-le-feu venait d’être entamé. Pendant les tractations politiques, par -20°C, les manifestants tenaient leurs barricades, la vie se réorganisait.
Depuis mon auberge de jeunesse au 7e étage qui donnait sur la place, j’entendais le soir les orateurs au micro et toutes les heures, l’hymne ukrainien qui résonnait dans la nuit.
C’est dans cette auberge que j’ai rencontré ceux de la Sotnia n°5, un groupe d’autodéfense de Maïdan, formé de volontaires de tous horizons. Un généreux et non moins mystérieux donateur leur avait payé des nuits dans les dortoirs de l’auberge. Cela faisait une dizaine de jours qu’ils dormaient là.
D’abord j’ai parlé à Maryna autour d’un café, puis elle m’a présenté Mikola, le prof d’informatique, Igor, avocat et assistant du Sotnik (chef de la section), Vitali, le marrant de la bande, Sacha, biélorusse qui avait fait 10 ans de prison, et tous les autres…
Leur barricade était petite, à l’angle du conservatoire de musique, il y avait peu de passage. Dans leur grande tente commune, ils tuaient le temps comme ils pouvaient, dans l’attente d’une impossible résolution de la crise. Ils me disaient « On restera là jusqu’à la fin, jusqu’à ce qu’on gagne la révolution. On n’a plus le choix. » Et ils attendaient dans le froid glacial.
Février – le 18, les groupes d’autodéfense manifestent devant le parlement. La manifestation tourne à l’affrontement et la police reprend du terrain : les rues Grushevsky et Institutska et une partie de Maïdan. De Paris, je suis les informations en continu. Est-ce la fin de Maïdan ? Que deviennent ceux de la Sotnia n°5 ?
Je suis de nouveau sur Maïdan le lendemain soir. Le propriétaire de l’auberge leur en a interdit l’accès, il y a eu des problèmes de sécurité. On passe la soirée les lumières éteintes, les rumeurs courent. Après une nouvelle nuit d’incertitude, le jeudi matin, les manifestants lancent l’assaut contre la police.
Dans le chaos sur la place, alors que les manifestant tombent sous les tirs des snipers, j’essaie de retrouver ceux de la Sotnia n°5.
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