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Julien Chatelin, Egyptorama

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C’est en parcourant les routes d’Egypte, loin de la place Tahrir, que m’est apparu plus clairement le sens de la révolution. A la sortie du Caire de l’autre côté du périphérique, loin du centre-ville, on se plonge progressivement dans un monde étrangement immobile, comme foudroyé en plein élan, où les projets mégalomaniaques des promoteurs semblent avoir été stoppés net. Territoires abandonnés, encore habités par quelques individus figés, comme dans une attente sans fin, l’air hagard. Les constructions inachevées qui ponctuent le paysage désertique provoquent une impression de défaite, d’absurdité.

En 2011, je quittai donc le Caire en direction du nord, vers la frontière libyenne. En opposition au tumulte et à l’agitation politique qui secouait la place Tahrir, centre névralgique de la révolution égyptienne, les villages, autoroutes, mosquées et habitations qui surgissaient sous mes yeux semblaient abandonnés, dessinant un chapelet de villes fantômes à travers un paysage presque stérile.

La logique architecturale et esthétique qui régissait ces ensembles semblait irréelle : une forêt de lampadaires, une vaste autoroute à quatre voies empruntée par quelques rares voitures, un panneau lumineux au milieu du désert vantant le site d’un futur projet immobilier avec ces mots : A breathtaking.

Ces zones, ni vraiment peuplées ni vraiment abandonnées, s’apparentent à des mirages modernes, faits de croissance économique et de progrès, coincées entre le vide du désert et les nouveaux vestiges urbains, entre promesse de développement et échec de sa mise en œuvre.

Il y a dans les espaces désertiques ou semi-désertiques, à l’instar des zones grises à la périphérie des villes, une profonde ambivalence. Espaces matriciels ou étendues superficielles, ils évoquent à la fois la fécondité et la stérilité, la promesse et le néant. La topographie anarchique de ces lieux est chargée de symboles et d’énergies contraires, où se joue un duel entre la ville et la nature.

Je débutai en Egypte l’exploration visuelle d’un phénomène beaucoup plus vaste, la mutation cyclique de notre environnement, où les villes se font, se défont ou sont parfois simplement abandonnées, dans une quête insatiable de nouvelles terres promises.

J’entrepris de poursuivre cette exploration visuelle, dans des territoires emblématiques, source d’une promesse passée, présente ou future : Detroit, fleuron de l’industrie automobile,  fut une des villes la plus riche et la plus attractive des Etats-Unis avant de subir un long processus de désertification et d’abandon. Norilsk, au nord de la Sibérie, est un paradis géologique, construit dans les années 30 par des prisonniers politiques dans un enfer environnemental et climatique. Enfin, j’ai exploré les provinces de l’ouest de la Chine impactées par le taux de croissance le plus élevé du monde.

Julien Chatelin

  

Julien Chatelin, Egyptorama
Du 19 avril au 3 juin 2017
6/8 rue de Savoie
75006 Paris
France
 
http://www.salonh.fr/
 

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