« J’ai vécu dans des villes sur les deux côtes, et j’ai découvert que le paysage créé par la main de l’homme amène les gens à accorder trop d’importance au pouvoir de l’humanité… quand on voit des gratte-ciel toute la journée, et qu’on voyage dans des trains souterrains ou des ascenseurs à grande vitesse, il est facile de surestimer ses capacités. » – Jonathan Blaustein
Les photographies de Jonathan Blaustein seront présentées dans le cadre d’une exposition collective d’art contemporain, The Mindless Consumption of Animals, qui ouvre ses portes au Harwood Museum of Art à Taos, au Nouveau-Mexique.
Jonathan Blaustein est un artiste, un écrivain et un enseignant installé à Taos. Ses photographies ont été largement exposées aux États-Unis et apparaissent dans de nombreuses collections importantes, y compris la Bibliothèque du Congrès, le Brooklyn Museum et le Musée des beaux-arts de Houston. Il écrit aussi sur la photographie pour le blog Lens du New York Times et A Photo Editor, et a enseigné à l’université du Nouveau-Mexique pendant de nombreuses années.
Sa série, The Value of a Dollar, a été publiée par le New York Times en 2010, et a immédiatement connu un franc succès sur Internet. Au final, cette série conceptuelle a été appréciée par des millions de personnes autour du monde, créant un dialogue quant à la manière dont la nourriture représente des problématiques plus profondes de richesse, de classe, de puissance et de santé. J’ai pu parler avec Jonathan récemment de son travail et de son exposition à venir :
Elizabeth Avedon : Nous nous sommes rencontrés pour la première fois il y a des années durant la CENTER’s Review de Santa Fe, alors que vous travailliez à cette série qui allait connaître le succès que l’on sait The Value of a Dollar. Expliquez-nous s’il vous plaît le point de vue qui sous-tend votre travail.
Jonathan Blaustein : Mon point de vue est nourri par mon passé et mes expériences, comme tout le monde. The Value of a Dollar est un projet qui est né de mon obsession pour la nourriture, de nombreuses années passées dans la restauration, grâce à ma formation artistique, et à mes études en économie.
La grande récession était imminente — je réalisais le projet au début de 2008 —, et j’ai commencé à consacrer plus d’attention au prix que pouvait coûter la nourriture saine. Quand j’ai commencé à acheter moins de fruits, notamment des fruits rouges, parce que mes revenus baissaient, j’ai eu l’impression que c’était une piste à explorer.
De plus, là où je vis, dans l’Ouest américain, sur les panneaux publicitaires et les flancs des camions, on voit partout des publicités vantant la nourriture resplendissante des fast-foods. Partout, nous pouvons trouver des visions artificielles de ce que nous mangeons. Et ce langage visuel est un facteur important de l’épidémie d’obésité américaine.
Finalement, j’ai eu l’idée d’aller faire des courses comme partie prenante de ma pratique artistique. J’ai acheté des choses, en fonction de leur potentiel esthétique et symbolique, avant de mesurer un dollar de chaque objet, avant de photographier ce fragment sur une table dépouillée de mon studio. Je voulais fabriquer mon propre langage visuel capable de questionner l’incroyable complexité sous-tendant l’économie mondiale, à l’aide d’un style d’image simple et pur.
J’ai tout photographié sans éclairage ni effets artificiels, pour que les aliments puissent valoir pour eux-mêmes et s’exprimer indépendamment.
Lire l’interview dans son intégralité dans la version anglaise de l’Œil