Omo : Une rivière de changement, par le photographe américain John Rowe, offre un aperçu de la progression dramatique du développement et de la mondialisation pour cette région considérée comme unique au monde d’un point de vue ethnique et biologique.
Pendant des siècles, la Vallée de l’Omo en Ethiopie, « berceau de l’humanité », a été le point d’affluence de migrations humaines, la rivière Omo jouant le rôle de centre économique, culturel et spirituel. En 2006, John Rowe a eu l’opportunité rare de photographier cette région avant qu’elle ne subisse certaines influences extérieures, comme celle du barrage Gilgel Gibe III, de l’agriculture industrialisée, des missionnaires et du tourisme. Pendant les dix années qui ont suivi, il a continué à témoigner de la zone et de ses habitants, abordant des questions telles que les conflits entre tribus, les déplacements de populations, la pauvreté, l’alcoolisme, la prostitution, les coutumes tribales et les pratiques traditionnelles.
Rowe n’a pas mis longtemps à prendre conscience de l’amplitude des phénomènes qu’il observait dans la vallée de l’Omo et d’à quel point ils étaient représentatifs des problèmes des tribus du monde entier. Ses photos témoignent d’une crise écologique et humanitaire dévastatrice. Comme le remarque Survival International, « c’est l’une des appropriations de terres les plus audacieuses que l’Afrique ait connue. Les tribus de la vallée basse de l’Omo sont expulsées de leurs habitats ancestraux, et leurs terres de pâtures et d’agriculture sont transformées en plantations industrielles de canne à sucre, coton et biocarburant. »
Avec la construction des barrages Gilgel Gibe, les problèmes auxquels les communautés du Bassin de l’Omo devaient déjà faire face se sont étendus à 300 000 personnes supplémentaires, qui vivent à côté du Lac Turkana – le plus large des lacs désertiques de la région – ou qui en tirent profit. L’Omo fournissant 90% de l’alimentation en eau du Lac Turkana, la réduction inévitable du flux causée par la construction des barrages représente un risque crucial pour l’existence même de ce qui représente une source d’eau majeure dans la région. Selon le président de l’agence nationale de préservation du Kenya, le barrage entraînera « la pire des catastrophes environnementales imaginable. »
« La vallée de l’Omo, connue comme la dernière frontière d’Afrique, accueille neuf tribus majeures et beaucoup d’autres plus petites qui sont toutes notablement uniques les unes pour les autres, » explique John Rowe. « C’est un lieu visuellement captivant, qui ne ressemble à aucun autre que je connais sur cette planète. J’y reviens année après année pour photographier non seulement les gens et le paysage, mais aussi les changements qui se sont produits si vite dans cette région sous-développée et recluse. C’est devenu ma passion de photographier ces peuples à des moments donnés de leur vie. »
La situation au Kenya et en Ethiopie est la même dans certaines régions d’Amazonie, d’Inde, du Myanmar, et de l’Arctique, entre autres, où les peuples indigènes luttent aussi pour maintenir leur mode de vie économique et culturel. On attribue généralement les problèmes de pauvreté, d’alcoolisme et de conflits entre tribus aux communautés du Tiers Monde, mais ils sont aussi le lot des peuples indigènes des pays développés, comme l’Amérique du Nord.
La série Omo : Une rivière de changement représente un microcosme de ces problèmes mondiaux auxquels les communautés indigènes sont confrontées dans des zones où les modes de vie traditionnels sont menacés par le monde moderne. Les photos tressent un récit complexe, montrant la résilience humaine et les paysages géographiques au cœur d’une crise humanitaire et écologique sans précédent.
John Rowe : la vallée de l’Omo
Autoédition
125$
http://johnrowephoto.com