Jim Sumkay, le plus connu des photographes qui se veulent anonymes, naît à Liège en 1954 à Liège. Il découvre la section arts plastiques de l’Institut Saint-Luc, puis vire au social et devient éducateur. Converti à la photographie il y a dix ans, il en devient « dépendant »… Il avait besoin de se « refaire », et s’est lancé dans le projet à la fois fou et fascinant de rendre compte, jour après jour, où qu’il soit et quelles que soient les circonstances, du monde qui l’entoure et des gens qui l’habitent. C’est donc à marche forcée que ce photoreporter humaniste de proximité pratique la mise en images du quotidien. Disponible, opiniâtre, il va à la rencontre des gens et met son énergie dans une chronique permanente à propos de ce qui se vit, de ce qui se passe (ou ne se passe pas) là où il se trouve. À la ville ou à la campagne, au soleil ou au coeur de la nuit. Tout l’intéresse, le banal et l’exceptionnel, les enfants, les vieux, les amoureux, les gens qui se croisent sans se voir ou qui se parlent, qui s’ennuient ou qui travaillent. Une chronique qui passe par la routine des courses et la promenade du chien, le recueillement d’une cérémonie religieuse, la fête de quartier ou la fièvre des élections, locales, régionales, nationales…
Documenter la vie et la société des hommes est une des belles et grandes missions de la photographie. Son « no comment » (il ne pose pas de jugement de valeur) – une vingtaine de photographies – est réalisé quotidiennement, sans aucun jour d’arrêt, et envoyé à ses correspondants. Liège, où il réside, y est certes très présente. Mais Bruxelles, Charleroi, Verviers, Mons et autres villes de Belgique le sont également et, ponctuellement, il s’échappe en France, en Allemagne, en Italie, à Cuba, en Haïti, en Pologne, en République tchèque. En 2014, il réalise en Ukraine une série importante sur les événements de la Place Maidan. Obsessionnelle, sa passion se concrétise cependant dans le sérieux de l’archivage. Le document n’a toute son importance que s’il est daté, identifié, conservé. C’est le cas grâce à une collaboration fonctionnelle qui implique l’Université de Liège et son Musée du Sart Tilman où le site de Jim Sumkay est hébergé et où, par date et par lieu, ses photographies sont accessibles.
Ce projet se révèle également démocratique, voire d’utilité publique car si Jim « prend » l’image des gens, c’est aussi pour la leur renvoyer en miroir, si possible dans le contexte, par exemple en l’affichant sur les palissades d’une gare, dans un Centre hospitalier, une chapelle, aux Francofolies de Spa ou en grand format à Aachen, Huy, Eupen, Poitiers, Paris, Berlin, New Orleans, La Havane…
Car Jim se sent bien partout, là où il y a des gens et qu’il peut leur parler, les écouter, les photographier.
Georges Vercheval,
Directeur honoraire, fondateur du Musée de la photographie à Charleroi