Jean-Philippe Charbonnier est le grand oublié de la photographie humaniste française. Cette rétrospective composée d’environ deux cents œuvres est la première à lui rendre hommage, depuis l’unique exposition organisée par le musée d’Art moderne de la Ville de Paris en 1983, et réalisée à l’époque avec Charbonnier lui-même.
L’étude du fonds d’atelier conservé chez Gamma-Rapho-Keystone a permis de découvrir toute l’étendue du travail protéiforme de Charbonnier. L’exposition s’articule autour de quelques grands reportages réalisés en exclusivité pour la revue Réalités. Parmi eux, certains des plus fameux – comme celui sur les hôpitaux psychiatriques par exemple- pourront être exposés dans leur totalité, alors que les images les plus dérangeantes n’avaient pas été publiées à l’époque. D’autres seront exposés pour la première fois, et notamment avec des photographies couleurs, éliminées jusqu’ici des expositions parce que considérées comme indignes d’être exposées. Parallèlement, cette rétrospective permettra de découvrir ses planches contacts, qui révèlent ses choix, ses recadrages, mais aussi, par leurs légendes détaillées dactylographiées au revers, son analyse fine et parfois teintée d’humour des sujets qu’il traite en profondeur. Photographe tout terrain aussi à l’aise chez les mineurs du Nord de la France que dans les coulisses des défilés de Christian Dior, Charbonnier réalisa d’incroyables photographies de mode, largement méconnues, révélant, entre autres, son talent de metteur en scène.
Enfin et surtout, l’exposition rendra compte du globetrotteur insatiable que fut Charbonnier, qui s’est rendu dans les endroits les plus isolés comme dans les plus grandes villes du monde : de l’Alaska à l’Ile de Sein, de New York à Kyoto, du désert du Sahara aux supermarchés américains, son regard rencontre celui des gens qu’il photographie, même au milieu d’une foule. C’est là la principale caractéristique qui le distingue d’un Cartier-Bresson par exemple : ses photographies ne sont pas prises « à la sauvette », à l’insu des acteurs d’un « instant fugitif », mais bien en pleine conscience de la présence du photographe, mû par la volonté de raconter l’autre et l’ailleurs.
Emmanuelle de l’Ecotais
Jean-Philippe Charbonnier – Raconter l’autre et l’ailleurs (1944-1983)
du 5 février au 19 avril 2020
Pavillon Populaire // Espace d’art photographique de la Ville de Montpellier
Esplanade Charles de Gaulle, 34000 Montpellier
www.montpellier.fr/pavillon-populaire