Jusqu’en novembre, Jean-Marc Tingaud expose au musée archéologique du Mont Beuvray ses images. Cette exposition, intitulée FRAGMENTS, Carnet de notes d’un proto-archéologue, voici comment il la présente.
Depuis l’origine relativement récente de la photographie – qu’est-ce que 193 ans à l’échelle de l’histoire de l’humanité qui en compterait 7 millions ? – les hommes n’ont jamais cessé de s’interroger : la nature, les animaux, les autres hommes, se nourrir, s’abriter, se chauffer, les divinités, les vivants, les morts, l’amour, la guerre, la paix, le bien, le mal, la terre, le ciel, le vent, l’eau des ruisseaux, des rivières, des fleuves et de l’océan, le feu des herbes et celui de la foudre, la neige et la glace, les grondements venus des tréfonds de la terre…
Ils n’ont jamais cessé aussi de documenter, commenter, argumenter, témoigner. Mais comment transmettre lorsqu’on doit tout inventer, passer du borborygme au langage, du cri informe au chant identifié, du trait improbable au dessin maîtrisé, de la glaise molle à la forme accomplie?
Autant dire que la proposition qui m’a été faite par Laïla Ayache, d’exposer au sein même des collections du Musée de Bibracte m’a impressionné, pour ne pas dire stupéfait. Ces salles, je les ai parcourues de nombreuses fois, la plupart du temps en famille, souvent accompagné des amis de nos enfants. J’aime le site, la belle nature qui l’entoure, l’architecture de Pierre Louis Faloci, la clairvoyance rare d’un Président de la République, François Mitterrand, décidant de sa création, jumelée à celle d’un Centre européen de recherche archéologique où se retrouveraient des étudiants venus de toute l’Europe.
Impressionné sûrement, jusqu’au moment où j’ai compris qu’en m’invitant à exposer mes œuvres en regard des découvertes constituant les collections du Musée, se révélait un lien de parenté très fort entre les recherches des archéologues et les miennes.
L’image choisie pour l’affiche de l’exposition, intitulée « Les temps nouveaux », a été capturée dans un intérieur de Berlin-Est, quelques mois après la chute du Mur. Elle nous montre peu, mais nous dit beaucoup sur la destinée, l’histoire, individuelle et collective souvent confondues. Elle nous dit qu’un jour, une famille a franchi les ruines de l’interdit d’hier pour aller acheter de l’autre côté une simple horloge à quartz, destinée à remplacer, au même endroit sur le mur, une pendule en bois, au mécanisme que l’on remonte avec une clé et son balancier qui fait tic-tac. Ils en avaient hérité de leurs parents qui habitaient là, avant la construction du Mur.
Cette photographie nous dit qu’un beau matin, à Berlin, une pendule, sous doute un peu chagrine d’avoir été détrônée, a malicieusement laissé sa trace, en silence…
Signe des temps…
Jean-Marc Tingaud – Fragments
Jusqu’au 11 novembre 2019
Bibracte
Mont Beuvray
71990 Saint-Léger-sous-Beuvray