Jusqu’à dimanche se tient le MAP, le festival photographique de Toulouse. C’est Jean-Jacques Ader, un photographe local très impliqué dans le monde local toulousain de l’image qui a tenu pour nous son journal.
Un véritable kaléidoscope visuel forme cette onzième édition pluridisciplinaire, composé par Pierre Garrigues son président et Ulrich Lebeuf qui en assure la programmation. Photojournalisme, mode, documentaire, recherche esthétique, une petite douche écossaise vous attend au fil de la visite. Voici trois apartés parmi les quinze expositions, dans les styles très différents qui nous sont données à voir.
Éric Bouvet, photojournaliste Français reconnu, propose ici des travaux en plusieurs lectures distinctes, dont un diaporama saisissant, qui montre son immersion au sein d’un commando Russe, et nous remémore la cruauté dont l’homme est capable en temps de guerre. Le défilement des photographies sont commentées par la voix poignante du photographe, nous confiant jusqu’à ses hésitations et ses doutes sur le rôle qui est le sien. En parallèle de ses commandes presse, dans la pièce voisine, une série en moyen format noir et blanc représente un travail plus personnel et réfléchi, dévoilant ça et là le quotidien de civils entourés de ruines et où la vie tente de reprendre le dessus, images rares qui laissent un goût amer dans la bouche.
Si la petite salle plongée dans la pénombre qui héberge les collages de Robin Lopvet n’est pas des plus spacieuse, l’ambiance met en évidence ses boites lumineuses. L’artiste y documente sa résidence artistique Taïwanaise sous une forme fictionnelle et en assumant totalement l’évidence des retouches numériques. Mais c’est derrière une vitre, qu’un écran mérite l’attention. La vidéo de 45mn qui y tourne est encore plus explicite en rendant visible la progression même des images, morceaux par morceaux, sous forme d’animation mise au point par l’artiste, elle illustre le processus créatif, et nous rappelle que chaque œuvre n’est qu’une construction, une organisation, à l’instar de l’environnement Taïwanais, et de part cette fragilité il est facile de le déconstruire.
L’environnement est aussi le centre d’intérêt de Guillaume Zuili. La mémoire urbaine qui hante les faubourgs de Los Angeles où il est le correspondant de l’agence VU depuis 2002, est retranscrite ici par des décors écrasés de lumière et creusés d’ombres granuleuses. Réalisées pour le festival, ces épreuves argentiques uniques nous rappellent, dans notre monde gorgé d’images, une des principales définitions de la photographie qui est : l’empreinte ; la lumière l’inscrivant sur une matière sensible, la restituant elle-même sous forme de valeurs de gris sur le papier. À travers cette matérialité, les photos de Guillaume Zuili nous permettent donc de voir maintenant ce qui a été, sans pour autant pouvoir être datées. Ce n’est pas seulement une démarche contemplative mais aussi un questionnement sur la représentation du monde, et de la place que nous y occupons.
La diversité des styles et l’esprit multi-générationnel sont clairement revendiqués par les organisateurs, masquant un peu l’affirmation d’une identité, mais au regard de l’éclectisme de la programmation (Peter Knapp, Marie-Laure de Decker et les représentants d’une nouvelle génération) et du chemin parcouru depuis plus de dix ans, le MAP nous réserve sûrement encore de belles émotions.
Festival photo MAP du 3 au 19 Mai, 24 rue Croix-Baragnon à Toulouse, entrée gratuite.
Programme détaillé et infos pratiques : https://map-photo.fr
Jean-Jacques Ader