Avec ce livre, qui est votre 26e ouvrage consacré à la photographie et aux photographes, comment résumer votre parcours et surtout vos rapports avec Doisneau ?
Je suis “entré en photographie” dans les années 1960 grâce au Club photographique de Paris, les 30 X 40, seule structure agissante dans cette époque où la photographie va connaître une réelle traversée du désert. Devenu un carrefour de rencontres du monde photographique, c’est là que j’y ai rencontré la plupart des photographes connus comme Brassaï, Ronis, Boubat, Dieuzaide et Doisneau, qui deviendront mes amis et sur lesquels j’écrirai par la suite.
Etrangement, Doisneau va un peu jalonner ma vie. Je le retrouve par exemple en 1968 lorsque le Grand Prix de la Photo du Musée Cantini à Marseille m’est attribué par un jury composé entre autres de Clergue, Sudre, Boubat et Doisneau. Je le côtoierai également au moment de la démolition des Halles, à la fois sur le chantier et à l’exposition accompagnant la sortie de mon livre L’Assassinat de Baltard (1972). Membre de la première équipe des Rencontres d’Arles en 1970, je le retrouve en 1975 où il en est l’invité d’honneur. Comme il sera présent au gré de mes principales expositions parisiennes, à la Photogalerie Les Forteresses du Dérisoire (1977) à l’Espace photographique de Paris Mémoire des temps et des lieux (1997) ou ailleurs. En outre, parallèlement à mon travail photographique, j’ai, depuis les années 1970 jusqu’à ce jour, assuré des fonctions de journaliste dans de nombreuses revues spécialisées françaises et étrangères qui me donneront de nombreuses occasions de m’entretenir avec lui ou de prendre le verre de l’amitié.
Comment dans ces conditions ne pas avoir envie de consacrer un ouvrage à un ami pour lequel j’éprouve beaucoup d’admiration ? Un ami chaleureux, drôle et toujours accueillant. Son immense carrière a fait l’objet, c’est vrai, de nombreuses publications, dont certaines thématiques où l’accent est, le plus souvent, mis sur un certain nombre d’images humoristiques et drôles d’un abord facile, ignorant ainsi la véritable constante qui court tout au long de cette œuvre, celle de l’homme socialement engagé soucieux de rendre hommage au monde du travail. C’est ce à quoi je me suis attaché dans cet imposant ouvrage de 540 pages et de 450 photographies qui célèbre l’immense carrière d’un des représentants les plus célèbres de cette photo humaniste qui s’est imposée dans les années 1950. Basée sur une lecture chronologique, cette succession d’images, divisée en cinq chapitres, souligne justement la cohérence du travail de Robert Doisneau en les situant dans son histoire.
Et surtout en lui laissant la parole, tant dans les textes que dans les nombreuses citations qui courent au long des pages. Instaurant, par là même, un dialogue permanent entre le lecteur et le photographe lui-même, mettant ainsi des mots sur la sensibilité, le sens de l’humour et la chaleur humaine qui caractérisent ses photos.
LIVRE
Robert Doisneau
Jean Claude Gautrand
Editions Taschen
Relié, 25 x 34 cm
540 pages
49,99 €