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Jane Evelyn Atwood par W.M. Hunt

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En 1980, Jane Evelyn Atwood a été la première bénéficiaire du W. Eugene Smith Memorial Fund Grant for Humanistic Photography. Sa récente prestation à Aperture, où elle a fait le premier discours (Smith Talk) de 2016, a marqué une occasion très spéciale. Il est d’ailleurs rare qu’elle parle en public aux Etats-Unis.

Jane Atwood a parlé de ses débuts et de certains de ses grands projets. Elle ne faisait des photos que depuis peu lorsque le photographe de Magnum Leonard Freed l’a encouragée à se présenter pour la première année du Fonds. Atwood a présenté une proposition sur la base de son travail avec les enfants aveugles.

Il paraissait peu probable qu’elle fasse carrière comme photographe… Américaine résidant à Paris depuis longtemps, elle a travaillé comme jeune fille au pair après  avoir terminé ses études à Bard College (New-York). Elle a commencé par photographier de façon informelle mais, encouragée par le propriétaire d’un magasin d’appareils photos, elle a échangé son Instamatic pour un Nikkormat. Une exposition de Diane Arbus à Paris l’a incitée à prendre exemple sur son travail. Un mardi soir, à l’un des vernissages de la galerie qu’elle s’était mise à fréquenter, elle a rencontré quelqu’un qui lui a proposé de la présenter à une prostituée nommée « Blondine »… Le thème de la prostitution est devenu central dans son travail. Atwood s’est ainsi plongée pendant un an dans la vie de ces femmes et de celle de leurs clients, à l’intérieur et aux alentours du « Select Bar » bientôt remplacé par le Centre Pompidou.

Au cours de ce travail Jane Evelyn Atwood a rencontré Freed, dont l’œil critique et les encouragements l’ont mise sur la voie d’une longue carrière, remarquable par sa rigueur et par l’aspect obsessionnel de ses recherches. Son travail n’est jamais mis en scène et il est fait « en privé », comme elle le voit, sans recadrage. Elle insiste sur le fait qu’ « une photographie intéressante est celle qui pose beaucoup de questions. »

C’est un incident incluant des hommes aveugles dont elle fut témoin qui l’amena à réaliser sa célèbre série sur la cécité. Aujourd’hui encore, ce thème continue de la fasciner.

Elle a également réalisé un reportage en couleur sur Jean-Louis. La chronique exceptionnelle d’un homme mourant du sida et qui a accepté, et même désiré, être photographié par Atwood. La photographe a finalement emménagé avec Jean-Louis pour l’accompagner vers la fin de son combat contre la maladie puis a pris à soin de lui à l’hôpital. Elle a alors réalisé le désir du malade de « se battre ensemble » et en public. Ce document très émouvant et personnel, le premier du genre, a été publié dans Paris Match en 1989.

La photographe a ensuite longuement parlé de son projet à long terme sur les femmes en prison partout dans le monde. Les portraits sont ici particulièrement frappants par leur grain, leur humeur sombre et leur sobre objectivité. Ce travail a eu des répercussions auprès d’Amnesty International et de Human Rights Watch, en réponse à la puissance des photographies réalisées.

Lorsque l’on a demandé à Atwood ce qui la motive, elle a répondu être emportée par ses propres projets. « Quand savez-vous que vous avez terminé ? » Selon Leonard Freed, à partir du moment où l’on commence à faire des erreurs. Atwood, quant à elle, dit qu’elle se méfie de sa tendance à rester trop longtemps sur un même sujet. Son conseil est celui de Marc Riboud, « Soyez présent et recevez ce qui est en face de vous. » Elle achève un travail lorsqu’elle « a compris son sujet, et que c’est dans les images. »

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