Nathalie Herschdorfer succède à Xavier Canonne, François Cheval, Christine Ollier et Laura Serani, parrains et marraines des précédentes éditions de Circulation(s). Nathalie dirige actuellement le Musée des beaux-arts du Locle, en Suisse. Elle a accepté d’être la marraine de Circulation(s) 2015 et a donc choisi de donner carte blanche à 4 jeunes photographes d’Espagne, d’Ukraine de Suisse et des Pays-Bas.
Ainsi c’est une Europe en mouvement qu’elle nous donne à voir, des regards très différents sur la jeunesse aujourd’hui: des portraits pris sur le vif du photographe ukrainien Ola Lanko à ceux de son homologue espagnole Danès Savi, qui capture la vacuité des relations dans une ville gelée, en passant par les grands rassemblements folkloriques bariolés du suisse Cyril Porchet ou encore les dyptiques de la série Tokyo Tokyo, du duo d’artistes néerlandais Wassinklundgren.
L’Œil a posé trois questions à Nathalie Herschdorfer :
Vous êtes la marraine invitée de cette cinquième édition, quel a été votre rôle au sein de la manifestion ?
Nathalie Herschdorfer : J’ai participé à la sélection des travaux exposés avec les membres de l’association Fetart. Nous nous sommes donc plongés dans des centaines de portfolios, tous sujets confondus , et provenant de toute l’Europe. C’est assez fascinant de se laisser porter par des travaux sans trop savoir quelles seront les découvertes. Suite à la sélection des 21 photographes choisis par le jury, j’ai réfléchi a ma carte blanche et ainsi sélectionné les quatre photographes.
Comment avez-vous appréhendé cette carte blanche ? Vous présentez quatre jeunes artistes européens, comment ses choix ont-ils été opérés ?
C’est un privilège d’avoir une carte blanche ! J’ai attendu de connaître la sélection du jury avant de réunir mes 4 artistes. Depuis quelques années, j’observe la disparition de genres photographiques qui étaient incontournables des générations précédentes. L’un d’eux est la street photography. La photographie du XXe siècle a porté ce genre au sommet et aujourd’hui encore, certains photographes se réunissent derrière sa bannière. Il y a même des groupes de Street Photographers qui se réunissent sur Internet ! Mais les jeunes photographes, et notamment ceux que je découvre dans les écoles d’art, ne semblent pas portés vers un tel genre. J’ai donc voulu découvrir ce que pourrait être le street photographer — le promeneur solitaire — auprès de cette génération : il y a ceux qui questionnent le genre comme Wassinklundgren (l’instant décisif existe-t-il vraiment ?), ceux qui en font une abstraction comme Cyril Porchet (plus proche du dripping de Jackson Pollock), ceux qui photographient les visages à leur insu comme Ola Lanko et, enfin, ceux qui échangent une fraction de seconde avec des passants comme Salvi Danes.
Travailler dans un lieu public et observer les gens restent donc une voie possible pour les jeunes photographes, mais leurs visions diffèrent beaucoup de celles de leurs aînés !
Quels sont vos “coups de cœur” au sein de cette édition parmi la sélection du jury ou les photographes invités ? Des découvertes, des nouveaux regards ?
Les images d’Anni Hanen faites avec son fils ou le travail de Laurence Rasti sur les homosexuels en Iran me touchent beaucoup.
Enfin, j’aime beaucoup les travaux d’Epectase, de Lonekke Van der Palen ou de Romain Mader, qui ont cette dose d’humour tant nécessaire à nos vies! Tout comme la série de Guillaume Martial, Le Modulor, absurde et burlesque !
La proposition d’Audrey Laurens est particulièrement fascinante à l’heure où nous sommes en permanence sur nos écrans. Son distributeur de petits portraits photographiques témoigne de notre attachement à la photographie en tant qu’objet physique. Qui ne va pas acheter une petite carte et la garder précieusement, telle une relique ?
BIOGRAPHIE
Nathalie Herschdorfer est historienne de l’art, spécialiste de la photographie. Elle dirige le Musée des beaux-arts du Locle, en Suisse. En 2010, elle a été nommée directrice du festival de photographie Alt. +1000 en Suisse et y a programmé deux ans d’éditions. Elle travaille également en tant que commissaire d’exposition auprès de la Foundation for the Exhibition of Photography (FEP). Pendant douze ans, elle a été conservatrice au musée de l’Elysée à Lausanne, où elle a organisé de nombreuses expositions, parmi lesquelles Faire Face : la mort du portrait et les rétrospectives d’Edward Steichen, de Leonard Freed, de Ray K. Metzker et de Valérie Belin. Elle est l’auteur de Jours d’après : Quand les photographes reviennent sur les lieux du drame (2011), directrice rédactionnelle de Construire l’image : Le Corbusier et la photographie (2012) et co-auteur, avec William A. Ewing, de reGeneration : photographes de demain , deux livres consacrés à la scène émergente de la photographie mondiale. Parmi ses derniers projets figurent un dictionnaire de la photographie (à paraître en 2015), New Swiss Architecture, une exposition qui circule à travers le monde produite par la Confédération, et Papier glacé : un siècle de photographie de mode, chez Condé Nast, une exposition itinérante produite par FEP et accompagnée d’un ouvrage publié en six éditions.
FESTIVAL
Circulation(s) #5
Du 24 janvier au 8 mars 2015
CentQuatre
5, rue Curial
75019 Paris
Entrée libre et gratuite
M° : Riquet ou Stalingrad
Ouvert tous les jours sauf le lundi
Du mardi au vendredi : de 13 h à 19 h
Le week-end : de 12 h à 19 h