Qui est l’homme urbain? De nos jours, plus de deux tiers de la population européenne se trouvent dans les villes. On peut s’intéresser à l’Histoire, aux évolutions économiques, sociales et juridiques des villes de ĺAntiquité jusqu’à aujourd’hui ; y ajouter les études portées par les sociologues contemporains, mais tout cela ne nous amène pas à comprendre la ville. À l’opposé des données scientifiques recueillies dans les annuaires statistiques et les recherches sociologiques, les photographies d’Imrich Veber offrent une vision complètement sensible et émotionnelle des villes européennes qu’il a visitées. Sans prétention de véracité, ses images viennent avant tout refléter une expérience car il explore la ville sans postulat sociologique, sans chercher à dicter ce que serait la ville aujourd’hui. / La série HOMOurban s’est construite entre les années 2007 et 2012. Elle se rapproche formellement de la tradition de la photographie directe, mais aussi de la photographie documentaire tchèque des années 70-80. Imrich Veber navigue dans la tendance appelée document social subjectif. Il n’utilise pas les technologies actuelles et ses photographies sans ancrage temporel reconnaissable paraissent venir hors du temps. Si l’on regarde d’un point de vue formel, ses cadrages resserrent l’espace urbain, marquent la solitude de l’individu au milieu de la foule, soulignent l’absurdité des situations, la mélancolie ; soit tout ce qui se retrouve dans le classique instantané de ville issu de la photographie documentaire. Il y a pourtant dans la série HOMurban quelque chose de plus. / Le photographe place côte à côte des vues de villes très disparates – Prague, Madrid, Opava, Belgrade, Mikulov, Olomouc, Évora, Budapest, Moscou, Porto, Berlin, Paris, Nida, Venise, Kerkyra, Oujhorod, Londre, Prešov, Rybaki, Lisbonne… Il brise l’habituel face à face qui cherche à pointer les subtiles différences entre l’Europe Occidentale et Orientale ou bien entre le Sud et le Nord, entre grandes et petites villes. C’est sur ce point de montage que le travail d’Imrich Veber se révèle provocateur et inattendu. Il propose un collage émotionnel à partir de points communs. Il croise les lieux, il révèle à notre regard des régions qui se ressembleraient. Ainsi, il créé une image de la communauté européenne qui passe par un dialogue des photographies, issues de ses expériences de vie à Opava et ailleurs.
Tomáš Pospěch