The Day Will Come. Voici le titre de la sixième Triennale de la Photographie de Hambourg et le moteur de recherche, pour ainsi dire, avec lequel le directeur artistique Krzysztof Candrowicz a travaillé pour composer la programmation de cette édition.
Krzysztof Candrowicz est commissaire d’exposition ; il a fondé et dirige en Pologne le festival international de photographie de Lodz, le Lodz Art Center et le réseau européen Photo Festival Union. En tant que directeur invité de la Triennale 2015, il a conçu en relation avec les conservateurs des musées de Hambourg hôtes du festival et d’autres partenaires internationaux une quinzaine d’expositions. Viennent s’ajouter des projets satellites organisés par des galeries, magazines et collectifs pour constituer un programme dense d’expositions visibles jusqu’à l’automne et un calendrier d’événements regroupés sur les dix premiers jours du 18 au 28 juin.
La Triennale de Hambourg 2015 conjugue la photographie au futur ; un medium généralement associé au passé autour des concepts de trace, de témoignage et de mémoire. Alors que la photographie entre de plus en plus en résonnance avec nos vies quotidiennes et les enjeux de nos sociétés contemporaines, serions-nous prêts à observer appareils photographiques et téléphones mobiles comme des boules de cristal présageant l’avenir ? Il est entendu que l’art a bien souvent été visionnaire.
L’actuelle exposition du BAL (Paris) intitulée « Images à charge » et conçue par Diane Dufour avec Luce Lebart, Christian Delage et Eyal Weizman traite de l’image produite en tant que preuve par des experts, chercheurs et historiens dans des cas de crimes du 19ème siècle à nos jours. La Triennale de Hambourg, elle, questionne également la véracité de l’image, tout en se demandant ce qu’elle peut nous apprendre sur le futur.
Où va la photographie ? Où nous emmène t-elle ?
« Le jour viendra où… ».
Souhaits, peurs, doutes et paris animent les travaux sélectionnés pour les expositions. Les artistes présentés s’interrogent notamment sur l’avenir du medium photographique au sens plastique (« The day will come When photography revises » – Kunstverein Hamburg), sur celui de l’homme en tant qu’individu (« The day will come When man falls – Deichtorhallen Hamburg/ Haus der Photographie) ou en tant que groupe social (« The day will come When we share more than ever – Museum für Kunst und Gewerbe). Les angles d’approche sont aussi bien philosophique que politique, comme dans l’exposition collective « The day will come When there is hope » à la Hamburger Kunsthalle qui traite les thèmes de l’immigration, de l’exil et de l’utopie de façon particulièrement intéressante.
A ne pas manquer au sein de la programmation : la vidéo « Centro di Permanenza temporanea » de Adrian Paci et le film « OTJESD » de Clemens von Wedemeyer, le making-off des autoportraits « Maybe » de Phillip Toledano, la série de Catherine Balet « Strangers in the Light », les exemplaires de « Toilet Paper Magazine » de Maurizio Cattelan et Pierpaolo Ferrari, le regard que Taryn Simon pose sur Google Images et enfin les commandes sur Hambourg passées à quatre photographes du collectif polonais « Sputnik Photos » (Adam Panczuk, Rafal Milach, Michal Luczak et Agnieszka Rayss) par les musées historiques de la ville.
La Triennale ce sont des expositions solo ou collectives ouvertes pendant plusieurs mois au public, mais elle se veut aussi et avant tout être identifiée comme un festival, soit un point de rencontre et de dialogue pour les professionnels et amateurs de photographie. Un ensemble d’événements – lectures de portfolios, remises de prix, soirées de projections, visites guidées et conférences – remplissent ainsi un calendrier intense à la hauteur des festivals internationaux aujourd’hui.
Le projet de « Container city » imaginé par l’équipe du festival est une belle métaphore de centre névralgique, croisement géographique et intellectuel. Plus de vingt containers sont placés en étoile devant les Deichtorhallen et contiennent les expositions carte blanche passées des festivals et écoles de photographie d’Europe et des Etats-Unis. Une météo capricieuse et un accrochage des photographies trop éphémère ont cependant fait de ce centre névralgique un village quelque peu délaissé selon les heures de la journée.
Créée en 1999 à l’initiative du photographe, collectionneur et mécène F. C. Gundlach en partenariat avec les musées et galeries de Hambourg avec pour volonté première de s’inscrire profondément dans la vie culturelle de la ville, la Triennale a désormais clairement pris une tournure internationale et se revendique être le plus grand festival de photographie d’Allemagne.
Un pari qui semble en très bonne voie, même si l’on peut s’interroger sur l’agenda des grandes manifestations dédiées à la photographie en Allemagne en regrettant qu’aucune n’ait encore réussie à s’inscrire annuellement. Le Fotofestival Mannheim-Ludwigshafen-Heidelberg, dont l’édition 2015 est dirigée par Urs Stahel, a lieu tous les deux ans depuis 2005, le Mois de la Photographie organisé à Berlin sur le modèle de Paris se déroule tous les deux ans également et la Triennale de la Photographie de Hambourg tous les trois ans… Une situation qui traduit un financement difficile de la culture en Allemagne et notamment les avantages et inconvénients d’un état fédéral.
Eva Gravayat
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Triennial Shows:
WHEN WATER MATTERS, Bucerius Kunst Forum, 6/13- 9/20 2015
WHEN MAN FALLS, Deichtorhallen Hamburg / Haus der Photographie, 6/19 – 9/6 2015
WHEN THERE IS HOPE, Hamburger Kunsthalle, 6/19 -9/13 2015
WHEN PHOTOGRAPHY REVISES, Kunstverein in Hamburg, 6/19 – 9/13 2015
WHEN WE SHARE MORE THAN EVER, Museum für Kunst und Gewerbe, 6/19 – 9/20 2015
WHEN THE PAST MEETS THE FUTURE, Historische Museen Hamburg : Altonaer Museum 6/19 – 11/22 2015, Hamburg Museum 6/19 – 10/18
2015, Museum der Arbeit 6/19 – 9/27 2015
Programme complet : http://www.phototriennale.de/exhibitions