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Grégoire Eloy: La vie et la mort de la mer d’Aral

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« Ressac » documente la vie autour de la mer d’Aral, dont la surface ne cesse de décroître, durant quatre voyages réalisés entre 2008 et 2013 au Kazakhstan et en Ouzbékistan. L’exposition présentera des impressions argentiques couleur et noir et blanc réalisées à la main et une vidéo documentant le retour sur les rives de la mer d’un vieux pêcheur et d’un jeune de 12 ans après que l’eau ait déserté les abords de leur village.

Dans les années 60, l’Union Soviétique décide de faire de l’Ouzbékistan son grenier à coton et construit à partir du plus grand fleuve d’Asie centrale, l’Amou-Daria, de nombreux canaux d’irrigation. C’est le début d’une catastrophe écologique.
Le débit du fleuve n’étant plus suffisant pour alimenter une des plus grandes mers intérieures du monde, la mer d’Aral rétrécit inexorablement. L’eau recule, s’éloigne des villages de pêcheurs. La salinité augmente dans des mesures telles que les poissons d’eau saumâtres disparaissent. La population se paupérise. Le climat change : de tempéré, il devient purement continental. L’air se charge de poussière, les maladies respiratoires font des ravages.
La mer d’Aral, n’est plus aujourd’hui qu’un grand lac. À peu près au niveau de la frontière entre Ouzbékistan et Kazakhstan, une digue a été construite entre 2003 et 2005. La partie Kazakhe de la mer d’Aral, toujours alimentée par son fleuve, le Syr-Daria, reprend vie. La pêche traditionnelle reprend.
Une mer, deux mondes, que Grégoire Eloy a explorés au cours de quatre voyages, en 2008, 2009, 2012 et 2013.
L’aspect purement documentaire a été rapidement évacué au profit d’une approche plus personnelle. Le photographe a rapporté de ces voyages une palette d’impressions marquée par une réflexion métaphysique sur l’absence, sur l’illusion. Que ce soit au Sud, où les villages de pêcheurs sont maintenant éloignés de plus de 200 kilomètres d’une mer qui fut leur environnement, où la ligne de côte, encore visible, dessine les contours de l’absence, où l’on marche sur le fond de la mer, faisant bruisser les coquillages séchés, où les broussailles argentées poussées ici et là créent des illusions d’optiques trompeuses et fascinantes, ou bien au Nord où malgré la vie qui reprend on ne peut jamais faire confiance à la mer qui se dérobe, s’évapore, ou se transforme en banquise d’un mètre d’épaisseur sur laquelle les pêcheurs roulent pendant des kilomètres, l’eau n’est, jamais, ni là ni sous la forme qu’on attendait.
Ce travail est pour le photographe la fin d’un cycle consacré aux pays de l’ex-Union soviétique, commencé avec les nouveaux contours de l’Europe, couronnée de la Bourse du Talent en 2003, continué en Pologne, en Roumanie, dans le Caucase, toujours plus loin vers l’Est, il s’achève ici. La fin de ce cycle coïncide avec la disparition de l’argentique, qui atteint fortement Grégoire Eloy, très attaché à ce médium. À une époque où il est de plus en plus difficile de trouver des laboratoires où réaliser ses tirages à la main, le photographe propose ici uniquement des tirages artisanaux, réalisés sous agrandisseur. Il multiplie les expériences de tirage liées à la chimie, pour lier le plus étroitement la forme à son sujet.
Cette réflexion poétique aux images émouvantes, au grain tremblé, dont la lumière voilée, oblique, souligne tour à tour les paysages d’apocalypse et la magie troublante des bouts du monde, est présentée dans un rendu qui mêle les formats (24×36, 6×6, 6×7), les genres (noir et blanc, couleur) et les médias (photographie et vidéo). Car le point final est le voyage filmé d’un vieil homme, ancien ouvrier d’une usine de poisson, qui n’a pas vu la mer depuis qu’elle s’est retirée, et de sa petite-fille, âgée de cinq ans, qui ne la connaissait pas. Un voyage à la rencontre de l’absente.

Grégoire Eloy est né à Cannes en 1971. Après une formation en économie et finance et une carrière en entreprise, il se consacre depuis 2003 à la photographie.
Il est assistant de Stanley Greene entre 2003 et 2005. Son premier projet photographique, issu d’un voyage sur les nouveaux contours de l’Europe réalisé au cours de l’automne 2003, est lauréat de la Bourse du Talent Reportage de Photographie.com en 2004. Depuis 2003, il poursuit ses reportages dans les pays d’ex-Union Soviétique et d’Asie Centrale sur des thèmes liés à l’espace, la mémoire et à l’héritage soviétique, plus récemment en Géorgie et autour de la Mer d’Aral. En 2010 et 2011 il collabore avec F93, centre culturel de Seine-Saint-Denis sur des sujets liés à la science, notamment sa série «A Black Matter» réalisée dans les laboratoires d’astrophysique qui fait l’objet d’une livre paru aux Éditions Journal en 2012.

Ressac
Photographies de Grégoire Eloy
Du 1er Juin au 27 Juillet 2013
12 boulevard des Filles du Calvaire
75011 Paris
France
+ 33 (0) 1 58 30 89 70
[email protected]
Mardi au Samedi / 12h – 19h

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