C’est dans la même salle qui avait accueilli, le 19 août 1839, l’annonce officielle de l’invention du daguerréotype par Louis-Jacques-Mandé Daguerre, que Graciela Iturbide a reçu le Prix de Photographie de l’Académie des beaux-arts – William Klein.
Véritable consécration, cette dotation exceptionnelle de 120 000 euros récompense un.e photographe pour l’ensemble de sa carrière et de son engagement en faveur du médium. Un prix qui, comme le souligne le secrétaire perpétuel de l’Académie des beaux-arts Laurent Petitgirard, « ne se soucie pas des esthétiques ou des chapelles. C’est un prix de liberté et de curiosité, voila pourquoi nous l’avons créé. »
Remis tous les deux ans, il a été créé en 2019 par l’Académie en hommage à l’œuvre de William Klein (1926-2022), avec le soutien du Chengdu Contemporary Image Museum. Graciela Iturbide est la troisième lauréate a recevoir cet hommage. Le photographe indien Raghu Rai fut le premier en 2019, suivi de l’américaine Annie Leibovitz en 2021.
Certains l’avaient découverte dans l’ambitieuse exposition que la Fondation Cartier pour l’art contemporain lui avait consacrée en 2022, sa première rétrospective française qui n’avait que trop tardé. Née en 1942 à Mexico, Graciela Iturbide a consacré sa vie à créer une photographie à la rencontre du documentaire et de la poésie. Sillonnant avant tout son pays, elle immortalise les Indiens Seris du désert de Sonora et les femmes de Juchitán dans des portraits sensibles et puissants. Les communautés mexicaines aux traditions ancestrales sont au cœur de ses préoccupations. Dans les années 1970, elle assiste le photographe Manuel Álvarez Bravo qu’elle suit à travers l’Amérique Latine.
Outre les belles âmes qu’elle a rencontrées au fil de sa vie, la photographe porte une attention particulière à la nature. Viennent immédiatement à l’esprit ses superbes compositions jouant avec des cactus ou des oiseaux. Ainsi que le souligne Sebastião Salgado dans un discours hommage : « Il est étonnant de voir comment Graciela [Iturbide] a dédié une grande partie de sa vie aux émotions humaines autant qu’à celles des végétaux. »
La manière presque spirituelle avec laquelle la photographe appréhende ce qui l’entoure ajoute à la fascination qu’exercent ses images. Animée d’une lumière singulière, Graciela Iturbide semble avancer un pied dans la réalité, un autre dans le rêve. Il est pour elle un fil rouge et un rempart : « Aller toujours plus loin dans la recherches des images entrevues dans les rêves et poursuivies dans la poésie et la cruauté du monde. »
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