Les cavaliers du diable
Comment photographier la guerre ? Certainement pas en répétant les images de cadavres, affirme celui qui a décidé de s’approprier et de retraiter les vues satellite des villages brûlés au Darfour — au moins 300 000 morts entre 2003 et 2006 — et pose la question de façon radicale. Débarrassées de leurs couleurs, transposées en négatif noir et blanc les captations de Google Earth deviennent des graphismes. On n’y trouvera certes pas d’informations, mais, incontestablement, de la forme. Ce n’est, à vrai dire, en rien différent de ce qui se passe avec les images issues de la tradition du photojournalisme, qui ne peuvent participer à un processus d’information que dans un contexte qui les accompagne de textes, de chiffres, de graphiques, de mise en page. L’information ne saurait provenir de l’image elle-même, qu’elle ait été réalisée dans la tradition photographique ou qu’elle soit produite par la sophistication des technologies récentes. Les satellites — qui balayent tout, surveillent tout — nous approvisionnent en formes. A décrypter. Tragiques dans le cas présent.