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Allemagne, années 1920 : Joris Ivens, Germaine Krull, Eli Lotar et Jean Dréville

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La projection du documentaire de 15 minutes de Joris Ivens, Regen (Pluie) (1929) a fait sensation pendant l’exposition de Thomas Walther au MOMA, « Objet – Photo ».

Allemagne, années 1920 : le jeune hollandais Joris Ivens est envoyé par sa famille à Berlin pour étudier les dernières techniques et technologies cinématographiques. Il fait la rencontre de la jeune photographe Germaine Krull au cours d’une fête entre artistes organisée par Arthur Lehning et Annie Grimmer, un soir du printemps 1923. Ils partageront pendant vingt ans leurs vies professionnelle, intime et maritale, mais pas leurs idées politiques. Comme le fait remarquer le biographe Hans Shoots : « Si Ivens ne s’était pas encore dirigé vers le communisme, Krull était déjà dissidente ».

Germaine suit son amant hollandais à Amsterdam, mais elle est mal accueillie par la famille de ce dernier. Ils restent ensemble malgré leurs séparations fréquentes, jusqu’à ce que Germaine ait une relation avec une femme en 1926. Lorsque Joris et Germaine se marient dans le 18ème arrondissement de Paris le 2 avril 1927, c’est par « convenance », pour que Germaine puisse obtenir son passeport. Entre temps, elle est devenue célèbre dans le milieu artistique et a pris pour amant l’un de ses assistants, Eli Lotar, jeune homme au profil si parfait que « c’était presque une souffrance de le voir » (Hans Shoots, Vivre dangereusement : Biographie de Joris Ivens, partiellement disponible en ligne).

Joris Ivens a retenu l’attention de l’avant-garde avec deux documentaires : De Brug (Le Pont) (1928) et Regen (Pluie) (1929), projetés l’année dernière au MOMA dans le cadre de l’exposition Object – Photo.

« Le Pont part en quête d’un langage visuel basé sur l’analyse systématique des mouvements d’un pont ferroviaire à Rotterdam, qui se soulevait et s’abaissait pour laisser passer les bateaux. Ivens a choisi de filmer cet objet précis parce qu’il répétait la même action à l’infini, action qui était ainsi la même chaque fois qu’il pouvait aller tourner, quittant son travail pour une heure (et quelques mètres de pellicule). Le film annonce dès le début son programme, en présentant les trois points de vues de la caméra, comme dans un dessin technique. En découvrant le film dans des cinéclubs, les jeunes cinéastes ont compris que le cinéma pouvait offrir de grandes possibilités, au-delà des conventions ou des genres. Ils avaient des idées arrêtées sur ce qu’était un bon ou un mauvais film, mais presque aucun interdit.

Dans un monde où les actualités étaient tournées par des cameramen qui restaient à une distance respectueuse des événements, il était évident que faire des gros plans et suivre l’action de près pouvait donner de meilleurs films, comme dans une fiction ou dans une création purement abstraite…

Le plus renommé des films de commande de cette époque est Philips Radio (1931), qui montre le travail à l’usine Philips, depuis les éclats de verre des valves et l’assemblage complet des radios, jusqu’aux laboratoires de recherches et à la salle des dactylos. Son titre français, Symphonie industrielle, semble plus adapté. Il rappelle non seulement les films de « symphonie urbaine » de cinéastes comme Walter Ruttman, mais annonce aussi l’extraordinaire bande son conçue spécialement pour le film, qui mêle des bruits de travail, de la musique, des émissions de radio et des sons abstraits. » (sensesofcinema).

En 1929, Ivens fut invité par l’Union Soviétique à se rendre sur place à partir de 1930, où il travailla avec Sergei Eisenstein, Vsevolod Pudovkin et Dziga Vertov, qui devinrent ses amis.

Il ne put être présent à temps plein sur le film de commande moins célèbre, Créosote, et demanda au jeune journaliste Jean Dréville de l’assister en Silésie polonaise et à Varsovie, ainsi qu’à Krull et Lotar de l’aider à Paris. Nous présentons ici un ensemble de vingt-quatre photos prises par Jean Dréville sur le tournage de Créosote, qui sont toutes des tirages uniques d’époque.

… « La créosote a été découverte par Carl Reichenbach en 1832, sous  forme de bois goudronné, dans le goudron et l’acide pyroligneux obtenu par distillation sèche du hêtre. L’acide pyroligneux étant alors connu comme un antiseptique et un conservateur alimentaire, Reichenbach réalisa plusieurs expériences consistant à plonger de la viande dans une solution diluée de créosote distillée.

Il découvrit que la viande séchait sans se putréfier, et qu’elle prenait alors un goût fumé. Il en conclut que la créosote était l’élément antiseptique contenu dans la fumée, et défendit plus tard l’idée selon laquelle la créosote qu’il avait trouvée dans le goudron de bois était également contenue dans le goudron de houille, le goudron animal et le goudron d’ambre, dans les mêmes quantités que dans le goudron de bois (…).

La créosote de bois fut utilisée peu de temps après avoir été découverte et reconnue comme l’élément qui permettait de fumer la viande (…) Même avant d’être découverte comme composé chimique, elle formait le composant actif principal de remèdes médicaux dans différentes cultures du monde entier.

D’un point de vue historique, la créosote de goudron de houille a été différenciée de ce que l’on considérait comme la créosote pure – la substance originale découverte par Reinchenbach – et désignée spécifiquement comme « l’huile de créosote ». Mais parce que la créosote issue du goudron de houille et la créosote de bois sont obtenues par des procédés similaires et pour des usages communs, elles ont été classées dans la même catégorie de substances, sous les termes de « créosote » et d’« huile de créosote », qui renvoient aux deux produits.

La créosote de bois est un liquide gras incolore à jaunâtre, au goût de brûlé, dont se dégage une odeur de fumée, qui produit en brûlant une flamme noire. Elle ne flotte pas dans l’eau ; sa gravité spécifique est de 1,037 à 1,087 ; elle conserve sa fluidité à très basse température et boue à 205-225°C. Elle est transparente sous sa forme la plus pure. Sa dissolution dans l’eau requiert jusqu’à 200 fois le volume de sa base en eau.

La créosote de bois est dans une certaine mesure utilisée pour la préservation du bois, mais elle est généralement mélangée à la créosote de goudron de houille, puisque la première est moins efficace. Les préparations de « fumée liquide » vendues dans le commerce, utilisées pour donner un goût fumé à la viande et pour aider à sa préservation, sont essentiellement un mélange de créosote et d’autres éléments constitutifs de la fumée.

http://www.plantureux.fr

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