L’artiste Laura Henno expose jusqu’au 3 novembre son travail sur les migrations au FRAC de Clermont-Ferrand. L’exposition présente son travail sur la région de l’océan Indien et quelques photos de Calais. Elle aborde des sujets complexes avec la nuance et la distance que procure le travail sur un temps long.
Photographier les marginalités
Laura Henno s’intéresse dans son travail aux communautés en marge de la société. En 2009, elle part en résidence à la Réunion et découvre un bidonville, près du centre de l’île. Elle va passer de nombreux moments avec la communauté qui l’accueille tout en photographiant ses habitants, en les faisant poser, une récurrence dans le travail de l’artiste. Ainsi, si les images sont travaillées et pensées en amont par Laura Henno, elles apparaissent sans artifice au spectateur. La photographe s’est par la suite rendue chaque année à Mayotte, ancienne colonie française devenue territoire d’outre-mer pour rencontrer, de jeunes Comoriens ayant migré sur l’île et vivant près des bords de plage de l’océan Indien.
« Le premier contact n’a pas été facile. Je les observais sur la plage et filmais les chiens qui les accompagnaient tout le temps. Ils m’ont encerclé et demandé d’arrêter. Je suis revenue une semaine plus tard pour leur expliquer mon projet qui porte sur leur communauté. Au fil du temps, nous avons appris à nous faire confiance », confie-t-elle.
Laura Henno a photographié le quotidien de ces jeunes hommes sur les plages mahoraises. Son œuvre inverse la représentation traditionnelle des migrants portée par les médias traditionnels en recherchant une vision dénuée d’une quelconque morale.
De jeunes passeurs dans le viseur
L’adolescence est un thème récurrent dans le travail de Laura Henno. Elle a rencontré des jeunes Comoriens à Mayotte, mais également des passeurs. Elle leur donne des visages et une voix. et les filme, à l’image de l’oeuvre Koropa qui suit la formation d’un jeune passeur. Patron a 12 ans. En pleine nuit, son oncle lui apprend à conduire un bateau. Plus tard, Patron sera seul pour faire les aller-retour entre Mayotte et les autres îles des Comores. Le regard vif, il est l’affût des potentiels dangers de la mer. Laura Henno a suivi Patron pendant plusieurs années et a pu rencontrer les cousins du jeune homme, eux-aussi passeurs. Une traversée sans heurts dure six heures. Patron et ses cousins se qualifient de « passeurs éthiques ». Contrairement à d’autres passeurs, ils ne surchargent pas les embarcations et débarquent à Mayotte, comme prévu. Certains passeurs s’arrêtent sur l’île de M’Tsamboro, titre éponyme de l’exposition, obligeant les migrants à repayer un autre voyage pour arriver à leur destination finale : Mayotte.
Le travail de Laura Henno est accompagné par trois films : Koropa, Djo et Ge Ouryao ! Pourquoi t’as peur !, un triptyque permettant de saisir la complexité comme la rudesse d’une traversée.
Le FRAC Auvergne
Le FRAC de Clermont-Ferrand a ouvert en 1984. Il s’est engagé dans un processus de décentralisation à travers le programme « Hors les murs ». Une quarantaine de villes de la région Auvergne-Rhône-Alpes accueillent des expositions d’arts contemporains, réalisées en partenariat avec le FRAC de Clermont-Ferrand.
Laura Henno – M’Tsamboro
Du 29 juin 2024 au 3 novembre 2024
FRAC Auvergne
6 rue du Terrail
63000 Clermont Ferrand
Ouvert du mardi au samedi de 14h à 18h
et le dimanche de 15h à 18
Site internet