Née à Santiago du Chili en 1944, la photographe Paz Errázuriz a débuté sa carrière artistique en autodidacte dans les années 1970, sous la dictature de Pinochet. Co-fondatrice de l’Association des Photographes Indépendants (AFI), elle utilise le portrait en noir et blanc pour dénoncer la dictature mais aussi les diktats sociaux condamnant des individus et des groupes à une marginalisation qui les rend invisibles. Son travail, qui s’inscrit dans le genre du documentaire social, traduit, depuis ses débuts, une énergie créative et une insatiable curiosité pour le genre humain. Chronologique et thématique, l’exposition « Une poétique de l’humain » rassemblera environ 150 tirages des années 1970 à nos jours.
Paz Errázuriz a développé sa technique photographique au fil du temps et à l’occasion de ses nombreux voyages. Nomade dans son pays natal, elle a notamment parcouru la Patagonie et la Vallée centrale, arpenté les rues de Talca, Valparaíso ou Santiago. Ce qui attire son regard, ce sont moins les paysages et les décors naturels que les personnes qui habitent ces lieux, leurs histoires individuelles ou collectives. En gagnant la confiance des êtres qu’elle rencontre, elle travaille au long cours, nouant des relations humaines fortes au-delà de ses photographies.
La dictature chilienne a profondément marqué ses débuts en tant que photographe. Couvre-feu, arrestations et persécutions étaient à l’époque le lot quotidien des Chiliens. Errázuriz menait souvent ses projets en violation des règles édictées par le régime militaire, en interagissant avec des personnes de tous âges et de milieux très différents : lutteurs, travestis, prostituées, tueurs d’abattoirs, aveugles, alcooliques, mendiants ou encore malades mentaux. Dans ces espaces fermés et confinés qui dominent son travail, elle semble chercher un comportement singulier qui lui offre un moyen de briser les règles établies. « La photographie m’a permis de m’exprimer à ma façon et de participer à la résistance. »
À cet égard, même si elles ne constituent pas autant d’exemples d’une pratique artistique accusatrice à prendre au pied de la lettre, ses images brisent de nombreux tabous dans la société privée de liberté qu’était le Chili jusqu’à la restauration de la démocratie. Par sa photographie engagée, Paz Errázuriz montre l’histoire troublée du Chili et explore son pays avec exhaustivité en donnant à voir ceux que la société ne regarde pas.
Commissaire : Juan Vicente Aliaga
Informations
Atelier de la Mécanique, Rencontres d’Arles
33 avenue Victor Hugo, Arles, France
03 juillet 2017 au 24 septembre 2017