Invité à Béthune par le centre d’art LaBanque, le photographe britannique Brian Griffin a arpenté la ligne de front de la Première Guerre mondiale. À la recherche d’une mémoire, de traces et de souvenirs, son imaginaire s’est confronté aux plaines plates et champs de pommes de terre de l’Artois. Il dépeint d’un regard tendre la région, ses couleurs tendres et son histoire recomposée…
Between Here and Nowhere est une ode postmoderniste imaginée par le photographe britannique Brian Griffin. Né à Birmingham en 1948, il grandit au cœur des Midlands anglais, un territoire que l’on surnomme le Black Country en raison des pollutions lourdes qui en encombrent le ciel. Il y voit se dessiner la fin de l’ère industrielle et s’établir les réformes radicales portées par le courant thatchériste. Tout d’abord apprenti ouvrier dans la sidérurgie, il étudie la photographie à Manchester, où il rencontre les photographes Martin Parr, John Davis et Chris Killip. Si tous trois dédient une partie de leur travail au Nord de l’Angleterre, les clichés de Griffin se distinguent par leur mordant.
Brian Griffin propose une narration pour partie fictionnelle : ancré dans le sillon agraire, son travail rejoue la tranchée, nous interrogeant sur notre rapport au corps, à l’industrie et, in fine à la guerre. Ses photographies sont des indices qui nous éloignent du réel. Elles se situent au contraire à l’endroit exact où le surnaturel affleure. Impossibles à situer dans le temps comme dans l’espace, elles posent question. D’où vient ce soldat qui prend la pose en costume, et où est le fusil qu’il ne tient plus en main ? Qu’est-ce que cette gelée rose dans laquelle flotte un œil ? Pas de réponse.
Si le postmodernisme préfère la périphérie au centre, c’est qu’il prône la perte de repères. Mouvement protéiforme, à situer du côté de la philosophie, des arts ou de l’architecture, le postmodernisme, tel que théorisé par l’architecte et historien Charles Jencks, sonne le glas de la pensée moderniste. Face à cette dernière, il marque un rejet ferme du rationalisme, du progrès social et d’une morale conçue jusqu’alors comme universellement applicable. Né au milieu du vingtième siècle, le postmodernisme rejette le concept de vérité absolue.
Bienvenue dans l’ère du doute. De même, Brian Griffin invite le visiteur à se perdre entre ici et nulle part avec l’esprit subversif de celui qui n’explique pas. Il comprime l’espace-temps, faisant de Béthune-Bruay la Twin Peaks du futur. Une ville dans laquelle l’explication rationnelle n’a pas valeur de dogme. Une ville dans laquelle, comme le dit le personnage de Gordon Cole dans la série de David Lynch : « deux et deux ne font pas toujours quatre ».
Commissariat : Valentine Umansky
http://www.lab-labanque.fr/ & http://www.briangriffin.co.uk/
Informations
La Banque (centre de production et de diffusion en arts visuels)
44 place George Clémenceau 64200 Béthune, France
17 mars 2018 au 15 juillet 2018