La galerie Artistics propose une exposition en ligne conçue comme un dialogue entre deux photographes contemporains, l’Allemand Bernhard Lang et le Français Matthieu Venot. Leur travail témoigne d’un intérêt partagé pour le motif et la couleur, mais leurs clichés se distinguent autant par leur sujet que par leur intention.
L’exposition rassemble les séries développées par les deux photographes sur les dix dernières années. L’étendue de cette rétrospective permet à la fois d’apprécier la cohérence et l’évolution de la démarche de chacun. La mise en dialogue de leurs oeuvres en souligne immédiatement les points communs : la prégnance des couleurs vives, qui attire et séduit le regard, et la composition autour de formes simples et graphiques – lignes, cercles et autres formes géométriques.
Cette dimension graphique est si présente qu’il n’est pas rare que les premières références qui viennent à l’esprit appartiennent au domaine de l’art abstrait : Malevitch et les constructivistes russes pour Matthieu Venot, certaines toiles de Mondrian ou de Gerhard Richter pour Bernhard Lang (en particulier pour sa série Tulip Fields).
Les premières séries de Matthieu Venot lui ont permis d’obtenir une notoriété rapide, d’abord sur Instagram où il s’est fait connaître dès les années 2010 (d’où leur format carré), puis auprès des collectionneurs. Ses clichés aux couleurs pastel, où des détails architecturaux se détachent sur un ciel toujours bleu, nous entrainent dans un monde hors du monde, optimiste sans niaiserie, à la fois bétonné et joyeux. Dans son objectif, la ville de Brest (où il vit et travaille et dont il a fait le sujet de ses premières séries comme Prism ou Ain’t Got No Troubles) prend des airs de station balnéaire sous les tropiques.
Il ne faut pas chercher dans son travail de sarcasme, de second degré ou de dérision : si sa photographie séduit, c’est simplement parce que le photographe parvient à communiquer au spectateur le plaisir qu’il éprouve à débusquer dans le paysage urbain des motifs à la fois pop et minimalistes.
Les bords de mer sont également l’objet de plusieurs séries de Bernhard Lang, que ce soit en Floride (série Miami) ou sur la côte adriatique (série Adria). Mais à la différence de Matthieu Venot, le photographe allemand s’intéresse à la vue d’ensemble plus qu’au détail : tous ses clichés sont des vues aériennes réalisées à partir d’un hélicoptère ou d’un petit avion, et parfois même à partir d’images satellites (série African Mines). Derrière leur aspect également très graphique se cache en général une multitude de détails qui ne se révèlent qu’au deuxième regard.
Ce n’est pas la seule différence : car si certaines séries ne sont pas dénuées d’humour et possèdent la légèreté de leur sujet (l’été et les vacances pour les séries Adria ou Versilia), leur réception provoque en général des sentiments ambivalents. Avec son sens de la composition et son talent de coloriste, Bernhard Lang transforme les paysages qu’il photographie en composition abstraites qui provoquent l’émerveillement. Mais le véritable sujet de sa photographie est de scruter l’empreinte de l’homme dans l’environnement, aussi envahissante que destructrice : de l’agriculture extensive en Espagne (série Mar del plastico) ou aux Etats-Unis (séries California Plants et Circle Irrigation), des mines du Bostwana aux aciéries de Rhénanie (série Stahlwerk), ses photographies nous montrent des paysages scarifiés, irrémédiablement transformés et envahis par une présence toujours plus parasite : la nôtre. Cette prise de conscience saisit le spectateur par surprise. Le plaisir esthétique que procurent d’abord ses images fait alors place à une réflexion plus amère.
Plus d’informations :
Bernhard Lang et Matthieu Venot : dialogue graphique – Exposition en ligne
https://artistics.com/fr/collection/photographie-bernhard-lang-et-matthieu-venot-dialogue-graphique/
Informations
Galerie Artistics
Paris, France
15 août 2023 au 17 octobre 2023