Andy Warhol disait qu’il aurait aimé être une machine, mais je ne fais pas référence à cela, pas exactement. J’utilise une machine pour prendre des photos, plusieurs en fait : parfois un Leica, un Canon, un Contax ou un Hasselblad. Pourquoi ? C’est difficile à expliquer, à vrai dire il est plus simple de ne faire qu’observer et repérer des sujets récurrents ; la répétition est fondamentale. De nos jours, tout le monde a un appareil photo dans sa poche et les gens sont devenus des machines dans le sens de ce que disait Warhol, des enregistreurs qui cherchent constamment à avoir une emprise sur le temps, en essayant d’immortaliser des instants furtifs et mondains. Le problème, c’est que le temps passe quand même, et nous échappe. Les livres, les fanzines et les films que je crée me permettent de prolonger la vie des photographies, de les mettre en mouvement.
Pour mon exposition à la galerie frank elbaz, je me suis intéressé à la dimension cinématographique des photographies, en produisant des photocopies rapides et des impressions couleur plus lentes, dans l’intention de tapisser les murs de milliers d’images. Guidé par mon intuition, j’ai sélectionné des photos dans mes archives. Cela m’a permis de regrouper de nouvelles images et d’autres plus anciennes, et de repérer des constantes dans mon travail. Au fil du temps, j’ai été amené à explorer des terrains inconnus, et plus particulièrement dans mes recherches récentes. Je suis guidé par la diversité des lieux que j’ai visités et des gens que j’ai rencontrés : des marginaux, des skateurs, des dieux du rap, des sportifs, des enfants, des arbres, des graffitis, des visages, du chaos et des voitures.
Le bruit, l’effort, la rébellion et le chaos ont toujours été l’essence de mon travail. C’est la première fois que je construis tout seul une machine ambitieuse, une installation singulière de huit canaux vidéo, montrant un ensemble aléatoire de mes courts métrages peu diffusés. Un vaste aperçu d’images du passé et du présent. Machine dépeint les sujets en leur ajoutant une dimension temporelle et en y incorporant le tumulte des lieux.
The Park est un film muet de 58 minutes réalisé en une seule prise de vue, qui a pour sujet un terrain de basket en extérieur à Brooklyn. Je suis fasciné par la vie quotidienne du parc, par les joueurs qui se défient mutuellement et par les jeux d’ombre et de lumière, compris dans un sens physique mais aussi introspectif. Situé en face du programme de logements Walt Whitman, le terrain de basket devient un lieu de liberté et d’expression. C’est le seul terrain que je connaisse à New York qui ne soit pas entouré de barrières, de telle sorte que l’activité du terrain se mêle à la vie qui l’entoure sans qu’il n’y ait de rupture. La New York Housing Authority a dépossédé les habitants de leur rue, The Park devient ainsi un échantillon de la vie de la rue telle qu’elle l’était avant.
Informations
galerie frank elbaz, paris
66 rue de Turenne, Paris, France
02 septembre 2017 au 14 octobre 2017