C’est le quatrième Dialogue de la Collection Ettore Molinario. Encore une fois un hommage au fétichisme. A côté d’une rose d’Edward Steichen, les bottes d’un photographe anonyme des années 60. Un lien les unit. Je vous invite à découvrir quel est ce lien et à nous suivre dans nos prochains rendez-vous
Les amateurs de roses savent que cette sublime fleur se divise en deux parties et que chacune d’elles, si opposées, représente la nature convulsive, contradictoire, chaste et cruelle du cœur humain. Ces adeptes du plaisir sont comme deux armées qui, au lieu de se heurter en rase campagne, se frôlent, les unes ramenant la corolle, les autres l’étrave, dans leurs tranchées. En 1920 Edward Steichen avait déjà été pictorialiste, était déjà apparu dans les pages de Camera Work, et était déjà le pionnier de la photographie de mode qui, trois ans plus tard, sera à l’origine de l’image de Vogue et Vanity Fair. Sa rose, si délicate, une photographie si directe, parle d’un amour si complet en s’ouvrant à la lumière et en déclarant l’obscurité d’où naît le tourbillon des pétales. Tout est en équilibre entre ciel et terre, entre une vie si parfumée et un parfum, l’eau de rose, utilisé pour préparer les morts à l’enterrement. Et puis la tige, ces jambes coupées dans le cliché d’un photographe allemand anonyme dans une Allemagne déjà divisée par le Mur ; ces jambes protégées par des chaînes et des cadenas comme s’il s’agissait d’épines, et ces talons qui élèvent la cheville et le gonfle comme un fruit, et encore ces lacets qui serrent la peau des autres animaux à la nôtre, ne sont rien de plus que le désir de protéger et de préserver cette beauté. Et que l’on appuie nos lèvres sur les pétales ou sur le cuir des bottines, peu de différences. De l’amour, de l’amour parfait, c’est de cela dont nous parlons.
Ettore Molinario