La prolongation de l’exposition The Dark Side à la Galerie Rabouan Moussion jusqu’au 15 mai et son nouvel accrochage permettent de découvrir les œuvres de l’installation The Keyhole, présentée au Grand Palais, pour l’édition 2012 d’Art Paris / Art Fair.
C’est à travers le trou de la serrure que l’artiste néerlandais nous y présenta son dernier travail sur la honte, invitant le spectateur à devenir voyeur. Les portraits présentés sur les cimaises de la galerie sont plongés dans des postures qui laissent transparaitre l’humilité et le remords – sans doute provoqués par une humiliation trop privée, de l’autre côté de la serrure.
Cette série de dix photographies renvoie aux fantasmes ancestraux, et évoque en chacun de nous un passage de son existence. Cette appropriation instinctive pourrait intervenir comme une inévitable prise de conscience de sa propre fragilité. Le champ chromatique des photographies d’Erwin Olaf est traversé de périodes obscures.
C’est ce que l’artiste et la Galerie Rabouan Moussion ont choisi de présenter dans l’exposition The Dark Side, témoignage artistique d’un parcours personnel sombre et intense.
Erwin Olaf, Prix Vermeer 2011 The Siege, 2011
Dans The Siege and Relief of Leiden (2011) Olaf dépeint les scènes iconiques de la libération de Leiden à travers ses personnages emblématiques. C’est une pièce historique monumentale, présentée pour la première fois dans les galeries de Musée de Lakenhal, aux côtés des peintures historiques décrivant le même épisode.
Dusk, 2010
Inspiré par la culture afro-américaine, il a puisé à la source de l’un des travaux novateurs du début du XXe siècle pour composer Dusk (le crépuscule), où les noirs et gris portent de manière allusive sur l’esclavage aux Etats-Unis. Les mises en scène nous plongent au XIX siècle grâce aux costumes, aux intérieurs, poses des personnages.
Separation, 2002
Erwin Olaf perd son père à l’âge de l’adolescence. Naîtra à quarante ans la nécessité pour lui de réaliser, au même titre qu’une analyse, cette série de 9 photographies, où la mère et l’enfant sont liés par une tension silencieuse insupportable. C’est la série de son travail la plus introvertie. Les personnages sont plaqués de la tête au pied dans un vêtement noir de latex, mais toute association avec le sexe est totalement déplacée, l’habillement semble être le symbole de l’isolement glacé des figurants. Un garçon et sa mère sont à l’intérieur d’une maison qui, en dépit de papier peint fleuri, n’offre aucune chaleur. Les photos sont en rapport avec dire « au revoir » et les souffrances des pertes de la vie. C’est un adieu symbolique, fait après la mort de mon père, et la fin d’un couple de toute une vie.
Paradise Portraits, 2001
« Pour moi, les clowns représentent l’anonymat et le danger. Même s’ils sont supposés amuser les enfants, ils sont effrayants », explique l’artiste. Cette série de portraits en plan serré fait suite à Paradise, The Club, où l’image inquiétante du clown était alors confrontée à une problématique nudité. Ici, l’«inquiétante étrangeté» est amenée par le maquillage dégoulinant, les rôles sont inversés : rien ne semble rappeler le caractère amusant des clowns. Ils sont effroyables.
Blacks, 1990
Les modèles photographiés par Olaf dans cette série ne nous mettent pas à proprement parler les sens en éveil, de par l’intérêt qu’ils suscitent dans une relation d’homme à homme. Il n’en reste pas moins que l’émotion – avec un grand E – dégagée par ces scènes orchestrées au millimètre près est d’une telle froideur qu’on croirait le monde devenu un champ de glace déserté. La beauté de Blacks réside dans le fait que les gens sont frappés de cécité. Le photographe s’est fait Dieu et son courroux s’abat sur eux tel un fléau sur des créatures sans défense. Pourquoi tous sont-ils noirs ? « Parce qu’ils sont mes esclaves, mes moutons noirs… », conclut Olaf.
EXPOSITION
Erwin Olaf The Dark Side et The Keyhole
du 6 mars au 15 mai 2012
Galerie Rabouan Moussion
121 rue Vieille-du-Temple
75003 Paris
France