De Gwenn Dubourthoumieu, nous vous avions présenté les palaces de Mobutu (http://www.lalettredelaphotographie.com/archives/by_date/2011-03-10/1650/gwenn-dubourthoumieu-palaces-of-mobutu). Aujourd’hui, voici l’un de ces derniers reportages sur les enfants de Kinshasa qui a reçu la Mention spéciale du Jury, Prix Scam Roger Pic 2011 et le Prix de l’enquête, festival européen du journalisme / Scoop Grand Lille 2011.
Entre 20 000 et 50 000 enfants vivent livrés à eux-mêmes dans les rues de Kinshasa. Organisés en bandes, ils survivent grâce au vol, à la débrouille et à la prostitution. D’après Médecins du monde, plus d’un tiers d’entre eux ont été chassés de leur foyer au prétexte qu’ils étaient sorciers et donc responsables des tous les maux de la famille (décès, perte d’un emploi, maladie etc.). L’immense majorité des Kinois est persuadée de la véracité de cette malédiction. Plus de cent nouveaux « sorciers » sont ainsi diagnostiqués chaque mois et jetés à la rue.
La croyance dans la sorcellerie est profondément enracinée dans la culture congolaise, mais le phénomène qui consiste à abandonner des enfants en les accusant de sorcellerie n’a pris une ampleur notoire que depuis la fin des années 1990.
Dans cet immense bidonville surpeuplé qu’est Kinshasa, où 95 % de la population vit de la débrouille et autant en dessous du seuil de pauvreté, les enfants sont des bouches à nourrir « improductives » dont les familles cherchent à se débarrasser. L’abandon des enfants pour cause de sorcellerie est le seul procédé « socialement acceptable ». Des églises charismatiques authentifient la possession et organisent l’exorcisme moyennant finance. S’il ne « fonctionne » pas, on jette l’enfant à la rue. On tente même parfois de le tuer.
Caroline Six
Mention spéciale du Jury, Prix Scam Roger Pic 2011
Prix de l’enquête, festival européen du journalisme / Scoop Grand Lille 2011