« Dans une posture sans doute héritée d’un classicisme ancestral, il est facile d’arrêter notre perception d’un paysage -voire même sa représentation, à un instant contemplatif. Il serait bien trop simple d’adopter cette position passive, naïve presque, face aux images d’Elsa Leydier. L’esthétisme inédit de son travail, au-delà d’une séduction formelle, est pensé et construit, non pas pour nous ravir à la réalité, mais pour nous y ramener.
Ces photographies sont drapées d’un voile semblable à celui d’un boîtier non étanche, comme une faille dans un système esthétique ordonné, et pour cause : photographe contemporaine, témoin d’un monde qu’elle voit s’obscurcir, trembler, étouffer, impossible pour cette artiste française ayant posé ses bagages sur les terres brésiliennes, de proposer une photographie aux œillères, détachée des enjeux qui traversent ses paysages quotidiens.
Nos paysages mentaux sont construits sur des représentations rêvées du continent sud- américain. Paysages Amazoniens luxuriants, liesse des foules, gloire sportive au sein du stade Maracana, telles des oasis décontextualisées, ces mirages – ou facilité de l’esprit, sont détachés de toute mise en contexte. Elles sont construites pour fonctionner de manière autonome. Et les travaux photographiques d’Elsa Leydier sont là pour les déconstruire.
Elle y procède de manière formelle dans sa dernière série, « #Elenão », qui introduit dans le code informatique même des images numériques, les paroles homophobes, misogynes, racistes, de l’actuel président brésilien. Cette irruption du contexte crée un bug dans l’image, un point de rupture matériel et idéologique entre nos paysages mentaux et le paysage politique.
Elsa Leydier nous rappelle ainsi que nos paysages sont pluriels. En associant à ses images plastiques des extraits de discours politiques, des images de journaux, des photographies vernaculaires, des données démographiques, l’artiste construit des images prismiques, au carrefour des enjeux contemporains. Aussi, si Elsa Leydier reprend la manipulation des images -celle-là même qu’elle dénonce, par une intelligence fine, elle en fait émerger une vérité toute autre : plus vraie, plus dense, plus vaste. »
Amélie Samson – Curatrice invitée
POLTRED – La maison de la photographie à Lyon
Premier concept store français sur la photographie, accueillant une galerie avec deux zones d’exposition, une boutique, un café, un espace de location journalière avec bureaux, un studio de prise de vues, des laboratoires argentique et numérique, Poltred est dédié entièrement à la photographie et aux photographes, amateurs comme professionnels.
Depuis septembre 2018, la maison de la photographie a ouvert ses portes dans le 3è arrondissement de Lyon dans un quartier en devenir situé entre la préfecture et la Guillotière. Galerie d’un genre nouveau, Pauline Maret et Julien Malabry proposent de faire découvrir aux lyonnais et autres visiteurs des artistes reconnus alternant ainsi les collaborations avec des institutions phares comme la galerie Polka et le festival Circulation(s), et des auteurs émergents découverts lors de lectures de portfolios. Poltred oeuvre pour ses artistes et soutient la photographie d’auteur.
Pour la biennale d’art contemporain de Lyon 2019, la galerie Poltred a proposé à Amélie Samson, curatrice et chargée de production des expositions pour les Rencontres d’Arles, d’assurer le commissariat de l’exposition. Elle a choisi d’inviter la photographe Elsa Leydier, en collaboration avec Yan Di Meglio, directeur de la Galerie Intervalle, Paris.
Elsa Leydier est notre correspondante au Brésil et elle vient de remporter le prix Ruinart et sera donc exposée à Paris Photo.
POLTRED
54 cours de la Liberté
69003 Lyon