L’aube arrive trop tôt
Je m’appelle est Ekaterine et je me considère chanceuse car j’ai une jumelle. Elle a 10 minutes de plus que moi. Grandir avec elle a été amusant et m’a aidé à bien des égards. Nous partagions les mêmes intérêts, les mêmes expériences et parfois nous faisions les mêmes rêves la nuit. À ses côtés, je n’ai jamais perdu le goût de la vie, la trouvant toujours pleine de magie et de surprises. Nous étions les meilleures amies et nous nous retrouvions partout où nous allions. Nous savions que nous pouvions compter l’une sur l’autre. Je me souviens clairement des moments de notre petite enfance où nous voulions toutes les deux les mêmes choses, nous nous habillions de la même façon, et plus tard dans la vie, nous avons fait preuve de sympathie envers les mêmes groupes de personnes.
Je me souviens également de moments de confusion et d’incertitude. Aujourd’hui encore, certaines questions reviennent souvent : « Qu’est-ce que ça fait d’être un vrai jumeau ? », puis « Est-ce que ça me plaît ? » ou « Est-ce que je peux ressentir les mêmes choses quand ma sœur n’est pas là, sommes-nous télépathes ? ». Ces questions nous sont souvent posées et la réponse est toujours la même : « Non, nous ne sommes pas télépathes, mais nous nous comprenons d’un simple regard. »
Ce projet est ma tentative de visualiser des moments particuliers de mon enfance, ces instants qui me rappellent les deux identités entre lesquelles j’oscille sans cesse- celle que je partageais avec ma sœur et celle que je développais seule. Ce travail porte sur ma quête sans fin de la découverte de soi pendant que je grandissais avec ma sœur jumelle. L’histoire de nos expériences partagées très privées de jumelles ainsi que dans dans un contexte plus large de famille. Le lieu est notre maison de village abandonnée jusqu’à récemment, un endroit que j’associe à l’idée d’abri. L’idée du projet est née du désir d’archiver les traditions familiales et de conserver le souvenir des objets, des lieux et des personnes qui ne sont plus là mais qui ont façonné ce que je suis aujourd’hui.
“L’aube arrive trop tôt” est un dialogue entre moi et ma sœur jumelle. Différentes périodes et différents lieux servent de toile de fond aux liens physiques et émotionnels forts que nous avons développés avec ces différents cadres. Le monde réel est transféré et visualisé par l’idée des relations et des émotions qui le constituent telles que les affections, la colère, la mélancolie et la solitude.
Ekaterine Kolesnikova