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Éditions courtes et longues : Pierre Apraxine with Jean Poderos : L’Image à venir. Mémoires d’un collectionneur

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C’est l’un des livres événements de cette rentrée. La publication de L’Image à venir. Mémoires d’un collectionneur de Pierre Apraxine aux Éditions courtes et longues. C’est ainsi qu’il est présenté :

Pierre Apraxine (1934-2023) est l’un des plus grands collectionneurs du siècle. Sa vie durant, il a embrassé le monde de l’art de son œil absolu. S’il est surtout connu pour la constitution de la collection Gilman, encore regardée aujourd’hui comme la plus grande, la plus belle et la plus prestigieuse collection de photographies anciennes en mains privées au monde et qui a rejoint en 2005 le fonds du Metropolitan Museum de New York, Pierre Apraxine fut aussi un inlassable découvreur et passeur d’art.

Pierre Apraxine naît en 1934 en Estonie. À l’aube de la guerre, en 1939, sa famille émigre à Bruxelles. Une fois ses études d’histoire de l’art terminées, Apraxine y rencontre le baron Léon Lambert, patron de la plus importante banque d’affaires européenne (aujourd’hui ING). Lambert veut, à l’instar de Rockefeller et Stuyvesant, développer sa collection d’art conceptuel et minimaliste pour en décorer les bureaux de sa banque. Apraxine l’aide dans cette tâche durant plus de trois années de recherches et d’achats de chefs-d’œuvre. Mais il répond bientôt à l’appel de New York où il part vivre en 1969 et qu’il n’a plus quitté jusqu’à sa mort. D’abord conservateur au MoMA, puis collaborateur de la Marlborough Gallery, il est approché en 1975 par Howard Gilman (1924-1998), magnat américain du papier, qui veut lui aussi décorer son entreprise d’œuvres d’art.

Gilman et Apraxine constituent trois collections : l’une d’art conceptuel et minimaliste qui sera vendue chez Christie’s en 1987 et établira des premiers records dans le domaine.

Une deuxième de dessins d’architecture utopique qui sera léguée au MoMA en 2003 et donnera lieu à la mémorable exposition « The Changing of the Avant-Garde: Visionary Architectural Drawings from the Howard Gilman Collection ».

La troisième de photographies anciennes. C’est celle-ci qui va déterminer le destin de Pierre Apraxine. Entre 1976 et 1998, il rassemble plus de 8 000 images (tirages et albums) dont la qualité, la variété, l’originalité et les passerelles qu’elles créent entre elles fondent une collection unique, enviée des musées du monde entier et qui viendra finalement enrichir en 2005 le fonds du département photographique du Metropolitan Museum.

Pierre Apraxine a façonné la collection Gilman comme une œuvre, riche des chefs-d’œuvre de Nadar, Édouard Baldus, Eugène Atget, William Henry Fox Talbot, Gustave Le Gray, JB Green, Carleton E. Watkins, Julia Margaret Cameron, Roger Fenton, etc. et de photographies remarquables d’auteurs moins connus. Il fut au cours de toutes ces années et finalement jusqu’à sa mort, le conseil des plus importants marchands du monde, des maisons de vente et surtout des institutions qui possèdent les plus belles collections de photographies anciennes au monde, parmi lesquelles la Bibliothèque nationale de France et le musée d’Orsay.

Pierre Apraxine est aussi le commissaire d’expositions qui ont marqué leur temps. En 1993, il présente, Metropolitan Museum avec Maria Morris Hambourg, directrice du département photographie, une sélection des œuvres de la collection Gilman(1 )dans les salles les plus prestigieuses du musée. En 1999, il organise une exposition révolutionnaire au musée d’Orsay, au Metropolitan Museum et à Turin, consacrée à la Castiglione, mondaine admirée du Second Empire qui, durant 40 ans, dicta au même photographe sa vision de l’autoportrait. En 2001, il coorganise au Metropolitan avec Jeff Rosenheim une très belle exposition sur le Nil. Puis, en 2005, il montre « Le Troisième Œil » à la Maison européenne et au Metropolitan, une exposition sur la photographie de l’occulte qui a suscité de multiples débats et passionné ses visiteurs.

Les mémoires, que Pierre Apraxine a écrits entre 2019 et 2023 avec Jean Poderos, dévoilent à la fois la vie d’un homme dont la noblesse résidait bien au-delà de son ascendance aristocratique et la trajectoire professionnelle d’un collectionneur unique qui a traversé le siècle et fut admiré de tous.

Ami de Mikhail Barychnikov, Isabella Rossellini, François-Marie Banier, Jean-Michel Othoniel, il fut le partenaire de collection de Maria Morris Hambourg, André Jammes, des Texbraun (François Brunschwig et Hugues Autexier) ou encore de Harry Lunn, et l’inspirateur de conservateurs tels que Jeff Rosenheim (Metropolitan Museum), Malcolm Daniel (musée des Beaux-Arts de Houston, Texas), Matthieu Humery (conseiller pour la photographie, fondation Pinault), Clément Chéroux (fondation Cartier-Bresson) et Quentin Bajac (Jeu de Paume).

Mais, plus que tout, Pierre Apraxine montre dans ses mémoires comment, nous spectateurs, façonnons l’œuvre d’art par notre regard, comment nous lui insufflons sa valeur esthétique.

Grand collectionneur, Pierre Apraxine savait regarder. C’est ce pouvoir-là qu’il nous a légué.

 

(1) L’exposition fut aussi présentée à la National Gallery de Washington DC et au musée des Beaux-Arts d’Édimbourg.

 

Introduction par Maria Morris Hambourg

Quand Jean Poderos rencontre Pierre Apraxine en 2005 à New York, il ne peut imaginer que derrière ce personnage discret se cache un des plus grands collectioneurs d’art du XXe siècle. Découvrant son parcours au fil des rencontres, mais aussi par l’intermédiaire de conservateurs de musées, d’artistes et de personnalités du monde de l’art qui l’évoquent tous avec respect et admiration, Jean Poderos est fasciné par cette trajectoire extraordinaire. En 2016, il suggère à Pierre Apraxine d’écrire ses mémoires. Quand il relance l’idée en 2019, Pierre Apraxine a eu le temps de faire mûrir l’idée et ne met que trois semaines à lui donner une réponse favorable. Ainsi commence l’aventure de ce livre en pleine pandémie, entre Paris et New York faite d’échanges intenses, parfois elliptiques, de confidences ponctuées de longs silences dans ce mythique appartement de la 12e rue. C’est l’intimité pudique, la carrière fascinante de ce personnage dans les coulisses du marché de d’art que nous raconte ce livre avec la sobriété et la justesse de ton qui anime souvent celui des grands hommes.

Ce livre de 324 pages retrace la vie de Pierre Apraxine: son enfance en Estonie, sa jeunesse à Bruxelles, la rupture avec sa famille et le choix d’une vie d’aventure.

Pierre Apraxine quitte le confort d’un avenir tracé auprès du Baron Lambert qui apprécie son talent et lui assure une carrière d’assistant curateur de sa collection à Bruxelles. Il rompt définitivement avec la réputation que lui offrent le nom de comte Apraxine et les relations qu’il s’est tissées en Europe pour se lancer dans l’aventure américaine. Non pas pour l’appât du gain, ni de la gloire, mais pour l’envie de la découverte, la vraie, celle qui pousse à défricher des territoires encore inconnus. C’est loin des préjugés et des archétypes dans lesquels s’englue la vieille Europe épuisée qu’il pressent que tout se joue. Arrivé à New York en 1969, il repart de zéro.

On ne peut comprendre la radicalité de cette rupture si on ne connaît pas le poids du monde qu’il quitte. On ne peut saisir l’importance du travail de recherche, la nouveauté de son entreprise, le caractère pionnier de la collection qu’il va créer si on ne remet pas les choses dans le contexte du monde de l’art dans les années 1960, si on ne perçoit pas la part d’engagement personnel qu’elle implique.

Tel est l’enjeu de ce livre. Il dénoue le fil de la vie de celui qui a créé la plus grande collection de photographie ancienne au monde et son implication sur le marché de la photographie en tant qu’art. Il révèle comment elle ne peut être l’œuvre que d’un seul homme : Pierre Apraxine, car elle est le résultat de son implication totale, tant personnelle que professionnelle.

C’est pourquoi le livre suit la chronologie de la vie du collectionneur. C’est dans cette rupture que se forge l’étoffe de ce collectionneur.

Il commence par le récit de l’enfance dans une famille de Russes blancs qui échappent à la Révolution sans être épargnée. Ces diverses propriétés familiales, où s’enracinent les valeurs, les traditions et les souvenirs d’enfance à jamais présents.

Puis, l’exil en Belgique, le manque d’argent pour cette noblesse déracinée et la responsabilité de porter un nom hérité d’une longue lignée de grands serviteurs de l’Empire russe. Une adolescence compliquée prise en étaux entre l’héritage familial moral et le pressentiment de porter en soi d’autres aspirations, contradictoires, incompatibles. Ses études aux Beaux-Arts, la révélation du plaisir d’explorer une œuvre, de la toucher, de la disséquer dans ses moindres détails comme un mécanicien démonte un moteur. Avec en filigrane, l’envie croissante d’un ailleurs, d’un monde ouvert, vaste où on peut être soi-même et espérer laisser une trace.

Dans ces mémoires, Jean Poderos restitue avec une fidélité étonnante la voix de Pierre Apraxine. On y découvre son mode d’expression par correspondances de pensées qui s’enchevêtrent et se répondent. On entrevoit chez Pierre Apraxine la nécessité de témoigner de son œuvre, de ses rencontres essentielles, l’envie de laisser une trace comme une « petite griffe sur le verre du monde ».

Pour le lecteur, le récit passionnant de cette trajectoire de vie est aussi celui de la formation d’un regard d’expert, la manière dont au fil des années et de ses rencontres, Pierre Apraxine s’est forgé un œil unique que tous lui ont envié. Il nous permet aussi de comprendre l’héritage qu’il nous fait, celui de voir aussi dans une œuvre ce que l’artiste n’y a pas mis. C’est là que réside le chef-d’œuvre, « dans les correspondances que nous lui trouvons ». Et « si je regarde l’art et que l’art n’est pas changé par mon regard, à quoi cela sert-il de regarder l’art ? », s’interroge-t-il. C’est en cela qu’il fut toute sa vie à l’affût de l « l’image à venir » .

Maria Morris Hambourg

 

L’Image à venir
Mémoires d’un collectionneur
Pierre Apraxine avec Jean Poderos
Introduction de Maria Morris Hambourg
Éditions courtes et longues

  • Collection: Les Grands
  • Dimensions: 17 x 24 cm
  • Broché
  • Nombre de pages: 352
  • ISBN: 978-2-35290-430-4
  • Prix public : 24 €
  • Diffusion/Distribution: Harmonia Mundi livre
  • Imprimé en Europe

www.cleditions.com

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