Donna Ferrato est une photojournaliste américaine vivant à New York. Née en 1949 à Waltham (Massachussets) elle se tourne vers la photographie en 1975 en sillonnant les routes américaines à la suite d’un divorce. Ses déambulations la conduisent à San Francisco où elle étudie la photographie à l’Art Institute of California. En 1977, après avoir cette fois sillonné les routes européennes, elle entame une série sur la fabrication du pain dans les boulangeries parisiennes.
En 1979, elle s’installe à New York et s’intéresse aux boîtes de nuits, strip-clubs et autres lieux, comme les cultissimes Studio 54 et Mudd Club. À la suite d’une commande du New York Magazine, elle photographie le club échangiste Plato’s Retreat et dans la foulée documente le quotidien de Garth and Lisa, un couple échangiste. Fréquenter le couple l’amène à s’intéresser aux violences conjugales, à ses ressorts psychologiques. « J’étais là pour les orgies ainsi que pour les moments familiaux typiques. Avec le temps, cependant, j’ai commencé à réaliser que Garth n’était pas le mari bienveillant et dévoué qu’il avait de prime abord semblé être… et une nuit, j’ai assisté à une scène horrible : Garth a attaqué Lisa et l’a battue sans pitié alors qu’elle se recroquevillait dans la salle de bain. Cette nuit m’a changé à jamais, et a également modifié l’orientation de mon travail pour les dix années suivantes… J’étais maintenant poussé à révéler les choses indicibles qui se passaient derrière des portes closes » « J’ai pris la photo parce que sans elle, je savais que personne ne croirait jamais que cela s’était passé » déclare Ferrato dans un entretien donné à Time Magazine en 2012.
Cette prise de conscience inaugure un travail de long haleine conclu par la publication de Living with the Enemy, chez Aperture Foundation, en 1991. Ce livre expose les ressorts quotidiens, la banalité des logiques physiques, psychologiques, obsessionnels propres à la violence domestique. 20 ans après, Donna Ferrato fut à l’intiative de la campagne I Am Unbeatable, documentant les trajectoires individuelles des victimes de violences domestiques par le biais d’archives historiques, de photographies et de vidéos.
Certains de ses travaux plus récents se sont recentrés sur son quartier new-yorkais, Tribeca. Donna Ferrato y vit depuis les années 1990. La vidéo suivante, intitulée What’s in the basement?, participe à cette ambition documentaire, donnant à voir une facette de New-York, interrogeant les passants livrés à eux-mêmes, en cette période de crise.
« La chaleur de la ville est oppressante. La nuit, les rues sont mortes. Se déplacer uptown ou downtown verse dans l’anarchie. Uber est inutile. Les taxis restent fiables. Les trains aussi. La police ne s’occupe plus de ce que nous faisons. Peut-être ont-ils peur de nous. Certains affirment qu’il faudra du temps avant que New York ne se remette de la confiance perdue dans les marchés. La peur devient contagieuse. Les propriétaires courent vers leurs enclaves tranquilles en pleine campagne. Tandis que les sans-abri échouent dans les rues.
New York est aussi anxieuse que sous Ed Koch (Maire de New york 1978-1989). J’attends de voir ce qui se passera ensuite. Marcher, regarder, faire la paix avec l’inévitable. Je veux être forte et prête pour ce qui viendra. C’est pour cela que je suis photographe. »