La photographie de Bernard Plossu [1945] est, depuis 50 ans, celle du voyage autobiographique et du hasard. Influencé par le cinéma de la Nouvelle Vague, les mouvements beatnik et hippie, il se laisse guider, au gré de ses rencontres, par ses intuitions poétiques et intimes. La technique est économe, les lumières sont naturelles et les cadrages souples. Son livre Le Voyage Mexicain, écrit entre 1965-1966 et publié en 1979 aux Éditions Contrejour, influence une génération de photographes. Aujourd’hui, avec près de 170 publications à son actif, Bernard Plossu entretient avec le livre un rapport unique.
En 2015, Bernard Plossu a donné sa collection de près d’un millier de livres de photographies au musée Nicéphore Niépce de Chalon-sur-Saône. C’est un ensemble inédit et original qui rentre dans les collections du musée : la bibliothèque du photographe.
Supports modestes et pratiques de diffusion des photographies, les livres circulent. Ils sont échangés, envoyés, offerts par les auteurs. Les photographes, bien sûr, mais aussi les éditeurs ou les écrivains. Les dédicaces font l’originalité de cette bibliothèque : les livres s’ouvrent sur des hommages, sollicitations,
des remerciements, et des marques d’affection.
Bernard Plossu refuse de hiérarchiser son réseau. Ni maître, ni homologue, ni disciple. Auteurs reconnus ou en devenir, tous sont des amis, compagnons de longue date ou rencontres récentes. La collection n’est pas ici un objet de spéculation. L’édition limitée ou « collector » n’est pas recherchée. Les livres sont simplement la monnaie d’échange de cette confrérie intergénérationnelle et internationale. Bernard Plossu en est le dénominateur commun.
Depuis le mois de mai dernier, une sélection de 38 livres de la donation de Bernard Plossu est exposée au musée Nicéphore Nièpce jusqu’en octobre 2017, dans la salle d’exposition permanente consacrée à l’édition photographique.
L’œuvre de Bernard Plossu est un périple sans fin entrepris dans le seul but de photographier. Partout où il nous emmène, la photographie donne lieu à des scènes dont on ne saura jamais l’importance. Seul le transport compte. Ballotés sur des chemins de fortune, il n’y a rien d’autre à faire que poser au plus près un regard sur le monde. Ce n’est rien, sinon des humains ! L’échappée sur la route est en fait un monument silencieux, un hommage à ce qui fait le sel de la vie, la rencontre.
François Cheval, Directeur du Musée Niepce