D’où vient votre photographie ?
Dimitri Daniloff : Ma photographie vient de l’observation des gens, du monde. Je traite mon sujet principal comme du reportage, je ne l’influence pas, je ne le dirige pas, je le laisse agir et capture l’instant que je cherche. J’interviens ensuite sur la réalité pour en modifier une partie, un aspect et la rendre conforme à ce que j’avais en tête. En modifiant une partie de cette réalité je rend visible l’invisible.
Quand a lieu l’instant décisif pour vous ? Qu’est-ce qui a inspiré votre travail / votre série ?
D.D : L’instant décisif est lorsque je vois, cerne, mon sujet pour la première fois, ce n’est pas forcément un moment ou j’ai mon appareil entre les mains. Par exemple dans la série « Un autre bout du Monde » j’ai vu mon sujet pour la première fois sur un quai de gare, entre 2 voies ferrées, un homme assis sur un banc sans bagage. J’ai fait abstraction de l’environnement et ne voyais plus alors que cet homme assis la au milieu de nul part, ne semblant même pas attendre un train, et c’est à la fois le temps suspendu et l’isolement de ce personnage qui m’on alors renvoyé à une multitudes de questions. J’ai donc cherché à reproduire cette image en multipliant les lieux. Dans la série « Mobilier Urbain » l’inspiration est venu lorsque j’ai croisé le groupe Graviteam qui pratiquent le Parkour, il s’agit d’une forme d’acrobatie urbaine. Le Parkour peut être assez spectaculaire mais ce n’est pas cet aspect la qui m’a intéressé mais plutôt le lien qu’ils ont tissé avec leur environnement à la fois très fort et dépendant. J’ai donc cherché à mettre en évidence ce lien.
Quel lien y a-t-il entre votre travail commercial et votre travail artistique ?
D.D : Le lien le plus évident me semble l’utilisation des outils de création visuel actuel, tel que Photoshop et la 3D. Mais c’est aussi et surtout lié à l’inspiration que trouve les directeurs artistiques dans les images créées par le photographe et l’importance de la création personnelle qui ensuite alimente la commande. Une priorité : une grande campagne de publicité ou exposer en galerie ? D.D : Les deux, l’un servant à financer l’autre.
Quelles sont les tendances photographiques actuelles selon vous ?
D.D : C’est un peu difficile de répondre à cette question car elles sont nombreuses, mais il me semble qu’on peut en définir 2 principales. La photographie « pure », numérique ou pas, mais avec une image qui ne subit pas de montage, ce qui n’empêche pas un traitement Photoshop pour le contraste, la couleur (équivalent au travail de laboratoire en argentique) et la photographie (photomagie) « truquée » qui fait appelle aux nouvelles technologies tel que la 3D et Photoshop.
La réponse à une question que je n’ai pas posée ? « – Peut on se fier à mes images ? » Et je laisse cette question en suspend car je trouve intéressant le flou qui existe a notre époque entre la réalité et le virtuel , le monde entre les deux étant défini comme réalité augmentée ce qui semble correspondre assez bien à mes images.
Après avoir commencé comme assistant de photographe en Europe et aux Etats Unis, Dimitri Daniloff (Paris, 1970) débute en 1998 une carrière de photographe indépendant, marquée dès le début par le désir de créer des histoires photographiques futuristes et subversives, nées de concepts et développées avec tous les outils numériques les plus novateurs dont il dispose. Manipulations et distorsions savantes, jeu de matières et de volumes construisent un univers fantastique qui a assis rapidement sa notoriété. Dimitri Daniloff est lauréat de nombreux prix photographiques et publicitaires, il a remporté notamment le grand prix de Cannes et participé la même année à l’exposition organisée à Paris par le Musée de la Publicité des Arts décoratifs sur la Photographie publicitaire en France, de Man Ray à Jean Paul Goude, exposition accueillie par la suite par Les Rencontres d’Arles.
REPRESENTATION
FRANCE : FLORENCE MOLL – www.florencemoll.com
UK : TERRI MANDUCA – www.terrimanduca.co.uk
GERMANY : MARLENE OHLSSON – www.ohlsson.de
USA : LEVINE/LEAVITT – www.llreps.com
Propos recueillis par Séverine Morel
