Je suis restée avec les Zürchers environ 3 semaines. Les premiers jours furent totalement dédiés à decouvrir leur univers : près d’une route, à l’abri des regards, une ferme nichée entre deux collines au bord d’une riviére, un paradis caché constitué d’êtres splendides, travailleurs, durs, résistants, créatifs, sensibles, éduqués, aimants avec leurs enfants, avec leurs arbres, avec leurs animaux, ouverts aux étrangers, cherchant quelquechose de calme, comme le reste d’entre nous, l’ingrédient secret qui manque pour un esprit en paix, pour un coeur contenté.
J’ai 40 ans, si j’ai de la chance je suis au milieu de mon chemin ici sur Terre, je devrais savoir des choses, j’ai visité des endroits, j’ai eu des experiences… Alors comment se fait il que le monde continue à me surprendre comme si je n’avais jamais rien vu ? Au détour d’une conversation, je lui demandais si il était son premier amour, elle répondit non, j’en déduisis qu’il était alors son dernier, elle rétorqua « non plus ». La complexité de leur relation se déploya comme une intrigue bien ficelée. Je frissonnais de découvrir ce qui les rendait si différents, ce qui rendait cela si difficile et si beau, l’énergie unique de cet endroit, le sens par dessus le désordre, le tsunami poursuivant sa course.
Une ferme en Suisse au milieu de nulle part m’apparue comme le centre du monde : elle m’ouvrait les yeux sur de nouveaux horizons sur la facon d’être des époux, sur de différentes et uniques manières d’être ensemble, d’évoluer ensemble.
Sous la beauté, sous toute beauté, existe un courant constant de souffrances. Les palmiers et les plages de sable blanc ont leurs moustiques à la nuit tombée, l’ordre et la securité de la civilisation occidentale laissent place à une impression de claustrophobie où le souffle de la vie se raréfie. Tout à un prix, pas parce que l’Univers est cruel, c’est juste une question d’énergie, de polarité et d’équilibre.
Ils seraient les survivants dans un scénario de fin du monde. Ils seront les héros d’un monde nouveau. Si courageux, si libres, si ascétiques et passionnés, si puissants et pourtant de si vulnérables créatures humaines. Quelle trace vive. Quelle empreinte inquiète. Quelle nature singuliére. Quel mythe, les Zürchers.
