James Hyman crée l’évènement et nous fait découvrir des photographies inédites de Raymond Cauchetier, photographe emblématique de la Nouvelle Vague. La plupart de ces trésors oubliés sont dévoilés ici pour la première fois.
« Au cours des derniers mois, j’ai eu la chance extraordinaire de collaborer avec Raymond Cachetier, grand photographe du cinéma de la Nouvelle Vague, pour la publication d’un magnifique ouvrage et dans le cadre d’une exposition passionnante présentée dans ma galerie à Londres.
À 95 ans, Cauchetier est une véritable source d’inspiration. S’il est effectivement un précurseur de la Nouvelle Vague, le photographe a bien d’autres cordes à son arc. De tous les paysages qu’il a photographiés en Asie du Sud en passant par ses études autour des églises romanes d’Europe, son travail se distingue par sa richesse et sa diversité. Au début de l’année, Cauchetier nous recevait l’éditeur James Smith et moi-même dans son appartement parisien, afin d’apporter les dernières modifications aux épreuves de son dernier livre : ce fût une rencontre inoubliable. En juin dernier, je fus par ailleurs ravi et honoré d’apprendre que Raymond se rendait à Londres pour la première fois, aux côtés de son épouse Kaoru, pour l’inauguration de sa superbe exposition de photographie autour de la Nouvelle Vague et à l’occasion du lancement de son livre. Avec abnégation, l’artiste s’est volontiers prêté au jeu des interviews, enchaînant les entretiens avec la BBC et les grands journaux nationaux. Ce fut un très grand moment. »
Raymond Cauchetier fait partie de ces « héros invisibles » qui ont marqué la culture française du 20e siècle : l’expert Philippe Garner nous le rappelle dans ce livre, comme il l’avait déjà fait auparavant dans une tribune pour l’œil de la photographie. En effet, plus que pour n’importe quel photographe de l’époque, les clichés de Cauchetier sont ceux qui ont su le mieux incarner, capturer et diffuser l’essence même de la Nouvelle Vague. Et pourtant, jusqu’à il y a quelques années, l’auteur de ces photos était presque un anonyme. Cauchetier a produit les photographies les plus emblématiques du cinéma français de la Nouvelle Vague. Des images gravées dans notre mémoire cinématographique, qu’il s’agisse de Jean Seberg et Jean-Paul Belmondo arpentant les Champs-Élysées lors du tournage du premier film de Godard À bout de souffle, ou encore de Jeanne Moreau et de ses acolytes courant sur une passerelle dans le film Jules et Jim.
Hormis pour les experts de la photo d’art comme Philipe Garner, le nom de Cauchetier est longtemps resté inconnu du public, et pour cause : les studios de cinéma ont longtemps exploité ses photographies pour des affiches, des supports publicitaires ou pour la presse sans jamais mentionner son nom. Ce n’est que très récemment que la justice française a finalement reconnu au photographe ses droits d’auteur, afin que son travail puisse pleinement être apprécié et mis en avant. Ainsi a commencé notre collaboration avec Cauchetier, et la création de séries limitées de ses photographies les plus célèbres, qui permettra au grand public d’acquérir de superbes tirages d’exposition. Cette collaboration a également mené à la création d’un très beau livre.
Néanmoins, l’histoire de ce photographe met en évidence une incohérence de taille : si Cauchetier dispose des droits d’auteur pour l’ensemble de son travail, il n’est pas le propriétaire de ses négatifs, la plupart restant en possession des studios de cinéma qui semblent aujourd’hui dans l’incapacité (ou peu désireux) de les retrouver et de les lui restituer. Dans ce contexte, retrouver un lot entier de photographies inédites relevait du miracle !
Cette trouvaille est uniquement due au hasard. C’est à l’occasion d’une vente aux enchères dans le sud de la France que je suis tombé sur un lot de pellicules 65 mm. Le propriétaire de ces films n’avait pas été identifié, mais j’ai aussitôt reconnu l’objet des photos : des images du film Jules et Jim. En examinant les pellicules, j’ai été surpris de reconnaître certains clichés : il s’agissait de photos de Raymond Cauchetier. Je fus d’autant plus frappé en découvrant une soixantaine de clichés qui cette fois, m’étaient totalement inconnus. Toutefois, l’esthétique, la composition et la conception de ces images ne laissaient aucun doute quant à leur auteur. Il ne pouvait s’agir que d’inédits de Raymond Cauchetier.
Je venais de mettre la main sur une remarquable collection de photographies de Cauchetier jamais publiées. Les photographies diffusées à l’époque où le film a été distribué en 1962 sont aujourd’hui très rares. Si rares que pour la plupart, Cauchetier lui-même n’en possède pas de tirages, encore moins les négatifs, bien qu’il détienne encore les planches contact originales.
Ces photographies inédites, tout comme les photos les plus célèbres de l’artiste, brillent par leur remarquable spontanéité. Au-delà de la simple capture, elles semblent à chaque fois saisir une certaine profondeur et une énergie chez les sujets photographiés, révélant leur sensibilité. Cauchetier l’explique parfaitement lui-même : « Pour moi, une bonne photo n’est pas forcément une photographie parfaite, bien mise en page, bien cadrée et soignée. Elle doit exprimer la vie, en saisissant un regard ou un geste. Sans cela, elle est vide de sens. »
Les photographies retrouvées relatent des scènes que tout le monde reconnaîtra, et d’autres, moins connues. En ce sens, le travail de Cauchetier relève plus du reportage ou du documentaire que de la photo publicitaire. C’est cette approche plus naturelle qui lui aura permis de saisir le quotidien des réalisateurs avec authenticité et tendresse, sur les plateaux et hors des plateaux de cinéma. Ses photographies nous transportent loin de l’univers habituellement artificiel des plateaux de tournage, et nous donnent l’impression de partager de réelles tranches de vie, prises sur le vif. Comme l’observe l’écrivain Marc Vernet : « La force des photos de Raymond Cauchetier ne tient pas au caractère exceptionnel de stars qu’il photographie, ou à la dimension artistique des réalisateurs pour lesquels il travaille. La force de ses photos tient à ce qu’il a su, avant tout le monde, capter l’esprit du mouvement qui sera (au moment où il fait les photos) la Nouvelle Vague. »
EXPOSITION PASSEE
Raymond Cauchetier’s New Wave
James Hyman Gallery
16 Savile Row
Londres
Royaume-Uni
http://www.jameshymangallery.com
EXPOSITION A VENIR
Raymond Cauchetier’s New Wave
Du 2 octobre au 17 janvier 2016
La Galerie de L’instant
46 Rue de Poitou
75003 Paris
France
http://www.lagaleriedelinstant.com
LIVRE
Raymond Cauchetier’s New Wave
Publiés aux éditions ACC
http://www.antiquecollectorsclub.com
