Rechercher un article

Denis Lebioda : Regards sur l’agriculture paysanne dans les Alpes françaises

Preview

Ce portfolio est un coup de coeur, le mien et il y en aura un autre. Un coup de coeur, un matin en recevant ces images de Denis Lebioda que je ne connais pas. Une bouffée de nostalgie, une profonde sympathie pour ces gens qui envers et contre tous se battent pour une dignité, une croyance et des racines et pour une approche photographique plutôt rare aujourd’hui. Le texte de Denis Lebioda est formidable : le voici. – Jean-Jacques Naudet

Je suis un auteur-photographe français, né en 1957, qui vit et travaille depuis 2001 dans le Champsaur, une vallée alpine du département des Hautes-Alpes. Je développe principalement une approche photographique artistique et documentaire et, depuis plusieurs années, un des volets de mon travail s’inscrit dans l’univers de l’agriculture paysanne en territoires de montagnes.

Raconter une histoire…

Au moyen de séquences photographiques je cherche à raconter une histoire, celle de ces agricultrices et agriculteurs, qui ont choisi une certaine approche de leur métier.

Cette approche, c’est celle de l’agriculture paysanne refusant, pour partie, les injonctions techniques et économiques d’une modernité et d’un progrès qui atteint de plus en plus souvent ses limites : machinisme et automatisation à outrance, intrants chimiques, nourriture et semences OGM, troupeaux de plusieurs centaines de bêtes…

C’est celle d’agriculteurs privilégiant la proximité, la responsabilité sociale et environnementale, le respect des animaux, les méthodes biologiques et le contact direct avec les consommateurs, notamment par une commercialisation de leurs productions en circuits courts (marché locaux, AMAP – Associations pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne, vente à la ferme…), de même que la recherche d’une relative autonomie face aux banques et aux aides publiques.

Et c’est aussi des choix de vies et de passions qui, pour un certain nombre d’entre eux, s’est effectué au cours d’une longue démarche évolutive personnelle et professionnelle, après avoir connu d’autres expériences de vie et de travail.

J’attache une grande importance (c’est la « commande » que je me passe) à aborder ces sujets de manière positive (à rebours de l’image de l’agriculture généralement véhiculée par les médias à travers manifestations, scandales sanitaires, difficultés économiques, suicides…).

Je refuse également d’idéaliser à travers mes photographies une paysannerie ancienne supposée heureuse, tout comme de faire pleurer sur un monde disparu ou en train de mourir.

Pour atteindre mes objectifs, je m’abstiens de faire des photographies spectaculaires aux accents médiatiques. Le sang et les larmes, l’esthétisme gratuit et grandiloquent, tout comme une idéalisation joyeuse du monde agricole et de l’environnement à travers des images publicitaires, promotionnelles et mises en scène n’ont pas leur place dans ma démarche.

Ce qui m’intéresse, c’est ce qui s’invente aujourd’hui, ce qui fonctionne, le plaisir et la passion qui animent ceux qui ont fait ces choix de vies, sans pour autant en nier les difficultés.

Il s’agit de chercher à rendre compte de la réalité contemporaine de cette activité multiforme, et de ses acteurs, dans toute leur diversité en traduisant, le plus fidèlement possible, ces relations complexes et très riches qui, dans les territoires alpins, unissent les hommes aux animaux, les hommes à la nature et la nature aux animaux.

Approche photographique…

Bien plus que simplement « prendre des photos », « faire un reportage », je recherche une rencontre, un dialogue, un échange, une certaine forme de complicité.

Avant d’appuyer sur le déclencheur, il est important pour moi de connaître et comprendre le mieux possible les hommes et les femmes, les animaux, les végétaux et l’environnement que je photographie.

Cela nécessite de passer du temps avec eux, beaucoup de temps. Pour chaque sujet photographié, les prises de vues s’échelonnent sur plusieurs journées, sur plusieurs années, à différentes périodes de l’année de leur travail.

Les photographies présentées ici ont été réalisées entre les années 2010 et 2015 et le travail se poursuit actuellement…

Techniquement, la recherche de la simplicité, de la discrétion et de la légèreté sont pour moi essentielles. Je travaille donc avec de petits boîtiers numériques (de marque Leica) et des focales courtes (28mm / 35 mm), à main levée, sans matériel d’éclairage, déflecteur et autres sortes d’artifices techniques et technologiques.

Je ne demande jamais de poser, de faire ou refaire un geste. Mon seul objectif est de me faire oublier le plus possible, de laisser mes « modèles » à leur travail, à leur passion, et de tenter de capter les moments où ils sont authentiquement absorbés par ce qu’ils ont à faire.

J’ai fait le choix de restituer ce travail en noir et blanc, et en format carré, à la fois parce que je me sens à l’aise dans un tel univers, mais aussi parce qu’en s’affranchissant de la couleur et du traditionnel format horizontal, il me semble que l’on s’approche un peu plus de l’essentiel, de l’essence du monde et des choses.

Si je devais positionner mon travail, je dirais que je me situe quelque part entre le photojournalisme et un travail documentaire / ethnographique, quelque part dans une démarche d’essai photographique, à l’instar du travail de quelques photographes qui figurent dans mon Panthéon, tels que Claude-Raymond Dityvon, Guy Le Querrec, Jean Gaumy, François Hers, Paolo Pellegrin…

INFORMATIONS
http://denis-lebioda.com
https://www.facebook.com/denis.lebioda

Merci de vous connecter ou de créer un compte pour lire la suite et accéder aux autres photos.

Installer notre WebApp sur iPhone
Installer notre WebApp sur Android