Le livre s’ouvre sur une « superbe » explosion. Il pourrait s’agir d’un feu d’artifice lancé lors d’une fête nationale ou pour le passage à une nouvelle année. Il s’agit d’une image illustrant la violence encore et toujours actuelle en Tchétchénie.
Nous l’avions annoncé dans l’Œil en décembre 2013 : Davide Monteleone, lauréat du prix Carmignac Gestion du photojournalisme, a réalisé grâce à la bourse obtenue un reportage en République tchétchène sur la période allant de novembre 2012 à avril 2013. Son travail a été exposé fin 2013 à Paris et a été publié chez Kehrer sous le titre Spasibo (« merci » en russe).
En République tchétchène, il y a des paysages magnifiques de montagnes et de forêts. On se marie, on partage des repas en famille, on participe à des cérémonies religieuses. La capitale, Grozny, est illuminée la nuit. Il y a des buildings flambant neufs et puis des ruines aussi. Il y a des soldats dans les rues, des checkpoints barrant les routes, des citoyens exilés, blessés, mutilés, assassinés. Les portraits de Vladimir Poutine, président de la Fédération russe et de Ramzan Kadyrov, président de la République de Tchétchénie sont omniprésents.
Davide Monteleone montre tout cela dans un reportage très bien composé. Ses photographies sont parfaitement cadrées. Elles témoignent avec finesse d’une situation étouffante. Un silence est perceptible : celui de la terreur normalisée. Le contrôle est avant tout psychologique.
Le spectateur n’est pas confronté à une violence directe dans les images mais l’angoisse en est d’autant plus palpable. Le photographe explique : « Bien que je vienne de la photographie documentaire traditionnelle, mon objectif n’est pas seulement d’informer mais aussi de créer des images qui sont l’interprétation d’une idée. Je veux que l’objet de mes recherches attire la curiosité de mon public et que celui-ci commence ainsi à se poser des questions sur lui-même. »
Les 86 photographies noir et blanc du livre Spasibo aident à appréhender la situation actuelle. Les textes de Galia Ackerman, historienne et traductrice spécialiste du monde russophone, et de Masha Gessen, auteure, journaliste et activiste russo-américaine, apportent un éclairage nécessaire entre faits passés et histoire contemporaine.
Davide Monteleone (né en 1974) débute sa carrière de photographe en 2000 en devenant photojournaliste pour l’agence Contrasto. L’année suivante, il déménage à Moscou où il travaille comme correspondant. Cette décision jouera un rôle déterminant pour la suite de sa carrière. Depuis 2003, Monteleone vit entre l’Italie et la Russie, menant à bien ses projets personnels. Il a publié son premier livre Dusha, Russian Soul en 2007, suivi de La Linea Inesistente en 2009 et de Red Thistle en 2012. Depuis 2011, Davide Monteleone est membre de l’agence VII Photo.
Les sujets déjà traités par les lauréats du prix Carmignac Gestion du photojournalisme depuis sa création en 2009 ont été : la bande de Gaza (Kai Wiedenhöfer), le Pachtounistan (Massimon Berruti), le Zimbabwe (Robin Hammond) et la République tchétchène (David Monteleone). L’Iran est le sujet du prix 2013 ; le reportage est réalisé en ce moment (décembre 2013 – mars 2014) et le nom du photographe lauréat sera rendu public en juillet 2014.
LIVRE
Spasibo
Editeurs : Carmignac Gestion Photojournalism Award, Nathalie Gallon
Auteurs : Galia Ackermann, Masha Gessen
Photographe : Davide Monteleone
Couverture rigide, 24 x 28 cm, 164 pages aet livret de 16 pages.
Anglais/français
ISBN 978-3-86828-466-9
58 €
La série « Spasibo » sera exposée du 6 septembre au 5 octobre 2014 en Allemagne au Fotografie Forum Frankfurt www.fffrankfurt.org
http://www.artbooksheidelberg.de
http://www.davidemonteleone.com/
http://www.fondation-carmignac.com