Nonnes
Lorsque j’étais enfant, entre cinq et huit ans, mes parents ont été contraints de m’inscrire dans une école catholique dirigée par des religieuses, l’Institut Santa Chiara à Sciacca. C’était la seule école, à l’époque, qui dispensait un enseignement à temps plein. J’allais à l’Institut à sept heures du matin et j’en sortais à cinq ou six heures de l’après-midi. En réalité, il s’agissait d’une sorte d’orphelinat. Les méthodes éducatives qui y étaient pratiquées feraient l’objet de nombreuses poursuites pénales aujourd’hui. Lorsque j’ai cessé d’y aller en 1978, je n’en ai gardé presque que de mauvais souvenirs, hormis ceux concernant mes camarades de l’époque. Mes premières photos les représentaient. Inutile de dire que j’en suis sorti athée.
Je n’ai pas une seule photo de ces religieuses. De certaines, je me souviens des mains énormes et rugueuses avec lesquelles elles frappaient, parfois à l’aide de bâtons fabriqués à partir de caisses de fruits. Je ne me souviens bien que d’une seule sœur, Sœur Costanza. Elle nous vendait des gommes aux fruits et nous donnait un sourire. Le sien et le nôtre.
C’est peut-être pour cela que lors de mes promenades, je n’hésite pas à prendre une photo si je rencontre une religieuse dans la rue. C’est ma façon de garder le contact avec quelque chose qui m’a blessé. Un contact qui a en lui, à la fois, le goût d’une vengeance enfantine et le besoin d’une réconciliation mature. Je suis toujours athée, mais les religieuses n’ont plus rien à voir avec cela.
Davide Interrante