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Daniel Boudinet, les villes la nuit

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Nous feuilletons toute cette semaine l’exposition Daniel Boudinet que Mathilde Falguière et Christian Caujolle ont réalisée à Tours. 

C’est en 1978 qu’a lieu la première exposition personnelle de Daniel Boudinet à la galerie La Remise du Parc, près de ce qui est encore le chantier des Halles, à Paris. Elle est sobrement intitulée « photographies en couleurs », et pour cause : c’est l’une des toutes premières expositions françaises à s’éloigner du noir et blanc. Pour la presse de l’époque, c’est une révélation : agissant « comme un peintre ». Daniel Boudinet se sert des couleurs pour créer ses compositions. Ce ne sont plus de simples informations qui se surimposent à un cadrage. Ce sont elles qui guident l’œil. « Les couleurs bleues, vertes, blanches ou oranges produites par ces éclairages jouent un rôle tel que ces photos reproduites en noir et blanc perdent leur véritable sens. » Pour les obtenir, Daniel Boudinet raconte comment il déambule, entre deux et quatre heures du matin, dans plusieurs villes européennes. Sensible aux différentes sortes d’éclairages urbains (gaz, filament, tungstène), il observe comment ces derniers colorent différemment ces paysages. Les très longs temps de pose densifient les couleurs représentées, et éliminent toute trace de mouvement. Ces espaces, où le temps semble suspendu, visent à « arrêter le regard ».

Explorer la couleur

À la fin des années 1970, la série Fragments d’un labyrinthe, Opus IV, réalisée à la chambre photographique, et de nombreux Polaroids marquent une nouvelle étape des recherches de Daniel Boudinet. Dans cette première série, il pousse à l’extrême sa démarche expérimentale : pour guider exactement la circulation de la lumière vers l’objectif, il va jusqu’à scier des meubles de son appartement. 

Ses carnets techniques attestent qu’il joue aussi sur les paramètres offerts par la photographie : filtres, réflecteurs et temps de pose atteignant quatre heures. Ces expérimentations mettent en évidence la manière dont la lumière construit, silencieusement, des espaces : une réflexion à la fois tendue et apaisée, des images parfois énigmatiques, mais toujours structurées avec une grande rigueur.

Daniel Boudinet s’intéresse aussi au Polaroid, réservé alors aux tests ou aux amateurs. Sur le Forum de Rome, cette technique exacerbe les variations de lumière, froide ou chaude en fonction de l’heure du jour, importante ou rare selon l’endroit qu’il occupe. La poésie de ces séries séduit un milieu photographique en pleine transformation. Daniel Boudinet est exposé par Michel Nurisdany au musée d’Art moderne de la Ville de Paris, dans son exposition-manifeste « Tendances actuelles de la photographie en France ». Ses photographies rejoignent des collections naissantes, tant publiques que privées.

Mathilde Falguière
Conservatrice du patrimoine, Mathilde Falguière est responsable du département de la photographie à la Médiathèque de l’architecture et du patrimoine (MAP). La MAP conserve des fonds complets représentant environ 20 millions de négatifs et tirages, et en leur sein la Donation Daniel Boudinet.

Christian Caujolle
Aujourd’hui commissaire indépendant, Christian Caujolle a notamment été directeur de la photographie au journal Libération, a créé l’agence et la galerie VU’, et enseigne à l’École Nationale Supérieure Louis Lumière, à Paris.

 

Daniel Boudinet, Le temps de la couleur
16 juin 2018 – 28 octobre 2018
Jeu de Paume / Château de Tours
25 avenue André Malraux
37000 Tours
France
www.jeudepaume.org

 

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