C’est toujours pour moi une grande joie de faire des portraits. Interagir avec la personne que je photographie me laisse la profonde satisfaction propre aux collaborations – même si certaines séances passent en un éclair.
J’ai photographié le sénateur Obama pour la première fois le 5 mars 2008, à San Antonio, le matin qui a suivi les primaires au Texas, qu’il a perdues au profit de la Sénatrice Hillary Clinton. J’avais été envoyé par Time Magazine pour faire un portrait de lui destiné à la couverture.
Lorsqu’on fait le portrait de quelqu’un, le temps qui compte vraiment est celui de la préparation et de l’installation. Une fois que le travail de mise en place est terminé, prendre la photo peut parfois sembler une formalité, l’agencement de l’éclairage et le choix du décor constituant la part du lion. On nous avait accordé vingt minutes avec lui. La séance s’est passée en douceur et sans accroc. Il s’est montré très sympathique envers mon fils de treize ans, Dylan, ce qui m’a beaucoup marqué.
Huit ans plus tard, en juillet 2016, j’ai été contacté par le New York Magazine pour photographier le président le mois suivant. Pour cette mission, il m’incombait de produire un portrait unique comme j’avais fait pour le TIME, mais aussi plusieurs images indépendantes. La Maison Blanche nous a accordé cinq minutes avec le Président. Une semaine avant la séance, j’ai pris un vol pour Washington pour visiter la Maison Blanche et faire un scounting technologique. Le matin de la séance, avec les cinq membres de mon équipe, j’ai passé quatre heures et demie à installer les éclairages et les décors en attendant l’arrivée du Président.
Pour créer des images qui se démarquent les unes des autres, j’ai utilisé dans les décors à la fois du papier uni et des toiles peintes. J’avais choisi un lieu situé en face d’une grande fenêtre laissant paraître l’architecture néoclassique qui indiquait immédiatement que la photo avait été prise à la Maison Blanche, puisque le bâtiment se détachait nettement au loin. J’ai voulu refaire l’une de photos non publiées que j’avais prises pour le Time en 2008, pour que les deux images puissent être publiées côte à côte dans le magazine, montrant les effets physiques de huit ans de présidence.
Même si toute la séance a été bien orchestrée, se déplacer d’un lieu à un autre et réussir tous les clichés que je voulais a été un vrai défi. J’ai dépassé le temps imparti de quatre minutes, puisqu’il m’en a fallu neuf au total.
Le Président est un gentleman. Son chargé des relations publiques lui a fait comprendre que nous avions dépassé le temps, mais comme il voyait que nous allions à vitesse grand V, il m’a permis d’avoir ce que je voulais. Au milieu de la séance, le Président nous a remerciés, mon équipe et moi, pour notre efficacité, en s’excusant que la séance soit passée si vite.
De toutes les photos que j’ai prises ce jour là, ma préférée est un simple cliché du président vu de dos, regardant à la fenêtre. Je me suis rendu compte lorsqu’il se dirigeait vers la fenêtre que l’on reconnaissait immédiatement sa silhouette, et les rayons de soleil qui dardent dans le cadre me font me souvenir de cette chaude journée du mois d’août.
Dan Winters
Dan Winters est un photographe portraitiste américain, illustrateur, cinéaste et auteur. Il est représenté par la galerie Fahey/Klein.