Alexandra Cool est une artiste qui possède une combinaison unique de talents en sculpture et en photographie. Son travail présente un rapport intime avec la nature, car elle respecte profondément les matériaux naturels avec lesquels elle travaille et apprécie leur beauté inhérente. Ce lien profond avec la nature est une grande source d’inspiration pour ses projets artistiques. Elle en tire un contexte de l’environnement avec son attachement important pour l’humanité.
Elle travaille depuis plusieurs années à Carrare (Italie), à New York et en Corse. Aujourd’hui, son port d’attache se situe a Ossogne-Thuin (Belgique) et en Auvergne (France). Elle a été exposée internationalement dans plus de quarante et une expositions en Europe et aux États-Unis. Cool participera à la 11e Biennale de la photographie 2023 à Condroz, en Belgique, en août. Sa présentation comprend à la fois des œuvres de sculpture et de photographie. Cet article se concentre sur trois de ses travaux sur la forme humaine et le portrait ; Mouseion, Fayum et The Time Being qui seront présentés à la Biennale.
Son portfolio et ses publications incluent Hellebosch, Madame Rennaissance, Wie Zal Het Zeggen, Mouseion, Zee, The Time Being et trois livrets Tibet, Corse, Cappadoce.
Weblink: http://alexandracool.com
Condroz Belgium Biennale: https://www.biennaledephotographie.be
Patricia Lanza : Parlez-nous de votre processus et de votre travail en sculpture et en photographie, et de votre médium de matériaux ?
Alexandra Cool : J’ai commencé comme sculptrice sur pierre. Mais de plus en plus j’aimais la beauté de la pierre elle-même, surtout celles façonnées par la nature. Chercher les bonnes pierres dans les rivières de montagne et au bord de la mer fait partie du processus artistique. J’ai commencé à les utiliser dans des installations et à les photographier. C’est d’ailleurs comme ça que je suis tombée dans la photographie. J’adore photographier la nature, les paysages, les pierres, les arbres, la mer, les nuages.
Quand j’ai une idée, je cherche la meilleure manière et les meilleurs matériaux pour lui donner forme. Il peut s’agir d’une photographie, mais aussi d’argile, de pierre, de bois et souvent d’une combinaison de différents supports.
Lanza : Considérez que vos thèmes sont souvent centrés sur le portrait.
Comment sont-ils arrivés : Mouseion sont les muses d’artistes célèbres, Fayum étaient des anciens Égyptiens et The Time Being sont ceux qui sont atteints de démence. Comment avez-vous découvert et abordé ces sujets ?
Cool : J’aime les gens, ils me fascinent et j’ai peut-être une certaine timidité et hésitation à les photographier. C’est peut-être pour ça que je préfère les modeler en argile. Modeler un portrait prend du temps. Le temps dont j’ai besoin pour vraiment m’approprier cette personne. Et ce temps de concentration est aussi vraiment un moment de bonheur où j’éprouve une compréhension et un amour pour le modèle.
Pour l’œuvre Mouseion, je rends hommage aux femmes de neuf peintres célèbres. Des femmes qui ont inspiré et consacré leur vie à ces artistes. J’ai d’abord modelé leurs portraits en argile que j’ai ensuite photographiés. Après J’ai colorié les photos et les ai imprimées sur de grands chiffons en coton.
J’ai fait une autre série sur les personnes atteintes de démence, je sentais que photographier n’était pas approprié. Par conséquent, j’ai décidé de rendre visite à douze personnes et de modéliser leurs portraits dans mon atelier, de mémoire. J’ai ensuite pris des photos des sculptures derrière une toile translucide.
Pour un autre travail, je me suis inspirée des anciens portraits égyptiens du Fayoum qui ont l’air incroyablement modernes et révolutionnaires pour leur époque. J’ai modelé un buste des personnes représentées dans les peintures et transféré les photos de mes sculptures sur des planches de bois. Les gens qui vivaient il y a environ 2000 ans reviennent à la vie.
Avec cette façon de travailler, je suis capable de réaliser des œuvres où le temps s’estompe et dans lesquelles je peux unir mes deux grandes passions : la photographie et la sculpture.
Lanza : Discutez de la façon dont l’environnement et la nature affectent votre méthodes de travail ?
Cool : Ma façon de travailler est assez élaborée, c’est un processus qui demande du temps, comme tout ce que l’on voit dans la nature. La nature prend plus de temps que moi, la nature a le don de la patience.
Je pense souvent à l’impermanence et au caractère changeant de toutes choses et je me demande s’il y a quelque chose que je peux créer quelque chose qui reflète une forme d’éternité.
Lanza : Sur quoi travaillez-vous actuellement et quels sont vos futurs projets ?
Cool : Actuellement je réfléchis à différents projets : un travail sur Camille Claudel, un livre sur la Corse avec un écrivain et une série sur des femmes qui m’inspirent…
Dans mes dernières œuvres, la nature devient un facteur encore plus dominant.
J’ai modelé une série de personnages en terre crue que j’ai déterrés dans mon jardin et mélangé avec différentes graines. Les graines ont commencé à germer et à pousser sur les sculptures. Comme ces sculptures ne sont pas cuites, elles se décomposeront mais les plantes prendront le relais et continueront à pousser.
Cette série a été exposée au Jardin Botanique de Louvain (Belgique), où j’avais placé les sculptures dans de petites « serres ».
De la même manière, j’ai réalisé une sculpture de Mayken Verhulst, la belle-mère de Pieter Breughel, artiste elle-même et force motrice de la dynastie Breughel. J’ai mélangé la terre avec des graines de fleurs. Comme j’ai fait cette sculpture sur un bel endroit dans une prairie à côté d’un étang, la pluie et le soleil ont fait dissoudre la sculpture. A la fin, il ne restait qu’un champ de fleurs.
Toutes ces œuvres n’existent désormais qu’en photographies.
À l’avenir, je veux continuer à travailler sur l’impermanence et la nature.