Née en 1988, et originaire de Normandie, Clémentine Belhomme se passionne pour la photographie argentique dès son plus âge. Spontanée et instinctive, elle débute en photographiant son environnement et en mettant en scène ses proches. Après un Master Photographie à l’université Paris 8, c’est à l’école de Condé (Design et Arts Graphiques) qu’elle tente de développer un univers singulier en appréhendant le médium photographique comme moyen d’expression et d’expérimentation. Clémentine Belhomme vit et travaille à Paris.
Pourquoi le photomontage ?
Le photomontage est venu à moi quand le simple fait de photographier ne suffisait plus. C’est un Art de l’hybridation qui brouille les pistes entre différents médiums. Il désigne très clairement l’acte de fabrication, la photographie intervient alors comme un matériau où une multitude de fragments viennent raconter une histoire, une idée, une poésie visuelle. Peut-on reconstruire après l’éclatement et la destruction ? Le jeu du photomontage est donc de créer un ensemble à partir de composantes fragmentées, et de jouer surtout sur le choix de ce que l’on insère ou de ce que l’on omet volontairement de mettre. Il s’agit peut-être d’une forme de manipulation après tout. Le photomontage induit aussi plusieurs étapes de création et laisse place à une certaine forme de hasard heureux, les trouvailles me surprennent parfois, ce sont elles qui souvent m’inspirent et m’invitent à la création.
Votre préférence est argentique ou numérique ?
La photographie argentique est ce qu’il y a de plus fascinant, le numérique est beaucoup plus malléable et transformable grâce aux logiciels de retouche et surtout moins coûteux aujourd’hui. L’argentique reste tout de même ma première expérience avec la photographie, j’entretiens avec elle une sorte de lien affectif, et le tirage argentique noir et blanc reste toujours une passion.
Vous réalisez toutes les prises de vue qui composent vos photomontages en amont, sont-elles faites avec une vision précise du “tableau” final ?
Je m’efforce de penser au maximum et au préalable à la vision de ce que sera le tableau final, mais je mentirais si je disais qu’absolument tout est contrôlé. Bien sûr, je me donne des directives et j’essaye de m’y tenir, en revanche j’aime laisser libre cours à mon inconscient et à mon intuition. Quelque fois, je passe des jours sur une même image sans comprendre pourquoi elle ne fonctionne pas, puis j’y reviens et je m’arrête de la retravailler quand l’objectif me semble atteint.
Diriez-vous de vos photos qu’elles sont volontairement surréalistes ? Pourquoi ce choix ?
Le surréalisme est l’un des mouvements de l’histoire de l’art qui m’a le plus marqué et qui m’inspire toujours aujourd’hui. En revanche, je ne me suis jamais lancée dans la création en me disant « je veux faire de la photographie surréaliste ». Le Surréalisme me touche dans sa façon de prôner une forme de liberté totale dans la création, et dans les thèmes qu’il explore comme : l’inconscient, l’inquiétante étrangeté, la réification de l’humain, l’érotisme voilé, la transfiguration de l’imaginaire et du rêve, etc.
Considérez-vous vos créations comme politiques ?
Je pense qu’il n’y a pas d’artiste “apolitique”, l’artiste se doit d’être un passeur, et de proposer au regardeur une vision du monde. Là encore, il me semble que mes images prennent une dimension politique de façon parfois inconsciente. Je suis moi-même révoltée par la violence du monde dans lequel nous vivons et la création me permet de transcender la colère, l’injustice, le sentiment d’impuissance, et la peur que j’éprouve. Le monde a besoin aujourd’hui plus que jamais d’artistes engagés pour continuer à réfléchir et à remettre en question le monde qui nous entoure. L’art n’a pas de frontière, il doit voyager, être partout, réunir les gens et offrir des alternatives.
Qu’est-ce qu’une photographie au XXIe siècle ?
La photographie est un dispositif à raconter des histoires, elle est un témoignage, une fenêtre sur le monde.
Y a-t-il une époque que vous auriez aimé photographier ?
La période des Avant-Gardes en Europe. Pour son ébullition créative et tous ses artistes précurseurs extraordinaires.
Qu’est-ce que le hasard ?
Je ne crois pas qu’il y ait vraiment de hasard, je crois que tout est écrit quelque part. C’est la sensation que l’on éprouve lorsque l’on est à l’écoute de son intuition. C’est alors qu’on est vite débarrassé de cette dimension dramatique que le hasard apporte à l’existence.