Balkan Trieste – Les damnés du Silos
Hiver 2024. Ils arrivent du Pakistan, d’Afghanistan, du Népal, puis de Syrie, d’Iran, d’Irak, du Bangladesh. Des hommes fuyant la misère, les guerres, la torture. Ils ont parcouru toute la route des Balkans, ils voyagent depuis des mois, certains depuis des années. Ils arrivent de Slovénie pour terminer le match à Trieste, la dernière frontière nord-est de l’Europe. Ils ont affronté des vicissitudes indescriptibles, surmonté les refus, les passages à tabac de la police des frontières, la faim et les températures glaciales. A Trieste, ils sont détournés vers les Silos, un grand bâtiment datant du milieu du XIXe siècle, un dépôt de céréales qui a accueilli les réfugiés istriens pendant la Seconde Guerre mondiale. Aujourd’hui, c’est une décharge pour les humains, une ruine archéologique menacée d’effondrement, en ruine et inhospitalière. Une honte nationale. Ici, parmi les souris, les serpents, la boue, le froid et la pluie, une humanité douloureuse et digne se réveille et s’endort chaque jour pour un temps infini. Dans les limbes des Silos, il n’y a pas de droits, il n’y a pas de toilettes, l’eau est collectée dans des bidons sur la Piazza Libertà. Ils cuisinent à même le sol parmi les détritus, nous dormons dans des tentes de fortune. Trois mois en moyenne pour une réponse de l’État italien à la demande d’asile qui permettrait d’accéder, avec une première réponse, aux parcours d’accueil prévus. Des attentes très longues malgré les chiffres officiels indiquant qu’il n’y a pas plus de 6 demandes d’asile par jour.