Le photographe allemand Christian Richter, 36 ans, a passé ces sept dernières années à voyager en Europe pour photographier l’intérieur de bâtiments à l’abandon, mu par son amour pour les motifs et textures qu’il y découvre. « Ils me rappellent que rien ne dure », dit-il.
Ces sites ont été abandonnés pour diverses raisons, connues ou non, comme le manque de financements ou parce que leurs propriétaires n’étaient pas en accord avec les autorités. Étages de magasins d’usine, chapelles ou théâtres, ces lieux avaient en commun qu’on y entrait à ses risques et périls. Une fois à l’intérieur, on écoutait leur chant du cygne avant leur effondrement. En réalité, dans certains cas, il aurait été moins dangereux d’y pénétrer au volant d’un bulldozer couvert qu’à pieds. Heureusement pour nous, Richter n’était pas de cet avis.
Depuis lors, il est allé plus loin, trouvant des lieux dans d’autres pays. Mais quel que soit l’endroit où ils se trouvent, ce qui fascine Richter, c’est leur beauté intrinsèque. Ils sont là, déclinant à toute allure, envahis par la nature. On découvre des espaces à la peinture écaillée, infectés par les rats, avec des tissus en lambeaux, des escaliers corrodés. Seule la nature a toujours séduit Christian Richter, mais ces autres motifs s’avèrent ici fascinants. Ces photos prouvent toutefois que la nature a toujours eu – aura toujours – le dernier mot, dans ses interactions avec l’homme que nous appelons “bâtiments”. Certes, nous, êtres humains, sommes voués à nous détruire en tant qu’espèce dans notre lutte désespérée pour puiser les dernières ressources. Mais lorsque notre espèce sera éteinte, la nature reprendra ses droits d’une façon ou d’une autre. Il n’y a qu’à voir Tchernobyl : la somme de preuves circonstancielles étaye l’affirmation et fait passer la pièce du recto de la ruine au verso de l’espoir et de la résurrection.
Si ces portraits de bâtiments à l’abandon nous parlent c’est d’ailleurs parce que nous ressentons toujours la présence humaine en eux. Nous avons l’impression que si les murs pouvaient parler, ils livreraient quantité de conversations, de larmes et de rires.
Christian Richter est représenté par Art Lexïng