Les allumettes
Quand je craque une allumette, j’enflamme mon cœur pour l’art, c’est comme un deuxième amour, un amour brûlant. Mon cœur bat pour quelques instants de bonheur, la flamme crée une œuvre créatrice, que je transfigure parfois car je ne cherche pas à rendre compte d’une vérité mais à satisfaire l’intimité de mon regard. Allumer le feu, allumer le feu, augmenter ma sensibilité artistique, j’affirme mon esthétique picturale, je construis, déconstruit, afin de proposer des atmosphères uniques qui renouvellent notre regard sur la réalité. La flamme sculpte des totems. Ce n’est pas par hasard que le feu me révèle des formes que j’arrête avec mon souffle créatif quand mon émotion visuelle est à son comble. Parfois mes matchs deviennent des personnages lorsque l’œuvre est placée sous le signe de l’expérimentation. Les matchs montrent une nouvelle personnalité. La vraie séduction consiste à amener les gens à admettre qu’ils sont vraiment des personnages. Mon univers artistique n’est pas celui de l’immortalité, mais celui de la métamorphose. L’œuvre d’art est une idée exagérée, mes œuvres photographiques, comme la collection de mes allumettes, sont criblées d’incertitudes quant à leur statut ; elles apparaissent sur une scène complexe où mon cheminement personnel croise vaguement la référence du médium photographique. C’est l’exploration, le questionnement et la poésie qui priment sur l’observation.
Christian Clausier