A la fin des années 50, le photographe suédois Christer Strömholm déménagea à Paris et s’installa Place Blanche, au cœur du quartier chaud de la ville, site accueillant le célèbre Moulin Rouge. La vie nocturne bouillonnante de cet endroit – les exhibitions en plein air, les performances sur les trottoirs, et les spectateurs ébahis – fournissait des sujets parfaits pour un photographe. C’est dans le cadre de ce décor surréaliste que Strömholm (1918-2002) rencontra et sympathisa avec une communauté de jeunes transsexuels, travaillant la nuit pour gagner l’argent qui servirait à payer leur changement de sexe. Physiquement mâles mais psychologiquement féminines, ces « petites copines » prenaient des hormones, se dotaient de noms de filles, portaient des vêtements féminins et des coupes glamours, des bijoux et du maquillage voyants. Ils étaient, en fait, des femmes à leur quintessence – des stars charismatiques sortant d’un film de Fellini. Pendant les dix années qui suivirent, Strömholm partagea leurs vies au quotidien, les photographiant dans des chambres d’hôtel, des bars, et des ruelles faiblement éclairées. Intégré dans leur univers mais jamais voyeur, il observait leurs existences avec tendresse, sensibilité, et esprit, et toujours un sens aigu de la responsabilité par rapport à celles qu’il documentait.
Cette exposition – la première présentation du travail de Strömholm dans un musée américain – propose la série impressionnante de photographies qui résulta de cette expérience : Les Amies de Place Blanche.
J’ai découvert Strömholm grâce à la Galerie Vu’ à Paris, qui promut et exposa son travail dès le début des années 2000. A l’occasion de Paris Photo au Grand Palais l’année dernière, le stand ICP se trouva être en face de celui de Vu’, ce qui me donna l’occasion de discuter un moment avec Gilou Le Gruiec et Vincent Marcilhacy du travail de Strömholm et de la nuit spéciale qu’ils organisaient à l’Institut suédois pour célébrer la publication des Amies de Place Blanche. Cet événement s’avéra être décisif : Brian Wallis, notre curateur en chef, y assista en compagnie d’Alice Zimet, collectionneuse de Strömholm de la première heure, et fervente supportrice d’une exposition à l’ICP. Quelques mois plus tard, Brian me proposa d’organiser l’exposition Les Amies de Place Blanche à l’ICP et de produire le même type d’événement à New York que la nuit mémorable à laquelle nous avions participé à Paris.
Christer Strömholm est né en 1918 à Stockholm et est mort il y a dix ans, en 2002. Il était l’un des pères de la photographie scandinave, et un professeur influent : ses disciples incluent des photographes suédois aujourd’hui au premier plan, J.H. Engström, Anders Petersen, et Lars Tunbjörk. Hautement révéré dans sa Suède natale depuis les années 60, récompensé du prix de la fondation Hasselblad en 1997, il est toujours assez peu connu en dehors du territoire européen.
Lire l’intégralité de l’article de Pauline Vermare dans la version anglaise.
Christer Strömholm: Les Amies de Place Blanche
Du 18 Mai au 2 Septembre 2012
ICP – International Center of Photography
1133 Ave of the Americas # 1A
New York, NY 10036, États-Unis
T : (212) 857-0000
