Mon coup de cœur AKAA 2019 par Thierry Maindrault
Pendant la semaine de la photographie parisienne, je fais toujours un passage dans le Salon Akaa (Also Known as Africa) qui présente au public les créations contemporaines fortement liées au continent africain. J’apprécie beaucoup cette manifestation qui noie les œuvres issues de la photographie avec l’ensemble des autres techniques artistiques et qui démontre beaucoup mieux que tout autre salon spécialisé que les créations photographiques tiennent leur place entière et incontestable dans la création.
Préambule achevé, après avoir apprécié les dernières créations uniquement photographiques présentées par la galerie VisionQuest de Gênes, j’ai vraiment admiré, dans le fond du carré réservé par la galerie «October Gallery» de Londres, cette série de photographies «décoiffantes».
Né en 1966 à Manchester, Benji Reid se revendique comme membre de la diaspora africaine. Benji Reid c’est l’archétype parfait du créateur polyvalent. Il a déjà produit et interprété plus de trente œuvres pour des institutions culturelles internationales de Birmingham à New York, en passant par le Sydney Opera House. A partir de 2012, il joint les techniques de la photographie à la grande palette de techniques qu’il maîtrise (danse, musique, théâtre, mime, ect.).
Il interprète son propre cheminement : «Dans les années 1970, je suis tombé sur les films, la musique et les voix qui me parlaient en images. L’art était pour moi un moyen de mettre en place des hyper-réalités, des conversations et de susciter mes curiosités.
J’ai été inspiré par tout, de Jacques Tati [Mon Oncle] à Ray Harryhausen [Jason and the Argonaut’s]. Mon pouls urbain et émotionnel a puisé dans une pollinisation croisée de hip hop et d’avant-garde japonaise découverte à Butoh. Celles-ci ont influencé ma façon de voir les paysages urbains.»
Pour ce danseur, le geste se doit d’être ludique même lorsqu’il sous-tend un stress dramatique ; de même que photographe, il ne conçoit pas d’image sans âme. Ces évidences sont le substrat du Choreo Photolist.
Le Choreo Photolist est une sorte de stroboscope de la vie de notre temps avec ses rythmes effrénés qui bouleversent l’évolution naturelle. Il ne faut pas s’y tromper derrière ses créations légères, pleine d’humour à l’esthétique raisonnée se cache des constations sévères pour notre époque et des messages d’espérances pour les générations d’après demain. Benji Reid s’emploie à le répéter et à le démontrer : le message est dans l’image.
La maîtrise technique est parfaite, presque trop parfaite, le style est pur, l’imperfection est proscrite. Le créateur domine la forme de son expression ou plutôt l’association des formes conceptuelles diverses qu’il domine avec brio. J’aspire à découvrir sa prochaine étape.
Thierry Maindrault
