(1/5) Pendant toute la durée de l’exposition qui a lieu au Jeu de Paume à Paris avec l’exceptionnelle collection Walther léguée au Moma, L’Œil de la Photographie se penche sur un chef d’œuvre en particulier. Aujourd’hui, portrait fugace à la main vive.
Un large sourire qui dit peut-être que le sujet s’amuse d’être ainsi photographié, mais une main gauche qui vient casser le cliché, comme pour arrêter le geste en face et signifier qu’il n’a pas tellement envie d’être sur la pellicule.
Il est pourtant photographe lui-même, László Moholy Nagy, originaire de Hongrie et qui va devoir fuir son pays onze ans après cette image, en 1934, pris dans la mécanique infernale de la Seconde Guerre mondiale lui aussi, théoricien du Bauhaus et grand manipulateur des images aux compositions surréalistes dans lesquels la lumière est un jeu provocateur et inquiétant, classé « artiste dégénéré » par les nazis.
Dit-il au revoir ou dit-il bonjour ? Salue-t-il pour la photo ou pour la personne qui tient l’appareil ?
Reste ce portrait étrange, pris sur le vif à une époque où apparaît tout juste la photographie de rue développée en autant de tableaux urbains saisis à la dérobée.
D’ailleurs, László Moholy Nagy ne semble pas être dans un intérieur, mais plutôt en train de marcher dans la rue d’une grande ville. Budapest ? Berlin ? Londres ?
La machine à photographier devient alors propagatrice de la flânerie, cette dernière qui est justement théorisée par le philosophe Walter Benjamin à peu près au même moment.
Jean-Baptiste Gauvin
Chefs-d’oeuvre photographiques du MoMA La collection Thomas Walther
Du 14 septembre 2021 au 13 février 2022
Jeu de Paume
1, place de la Concorde
75001 Paris