Xavier Baudoin, Directeur des Études artistiques, Académie de France à Madrid, CASA DE VELÁZQUEZ
La Casa de Velázquez est, tout à la fois, un centre de création artistique et un centre de recherche. C’est ce qui fait sa singularité parmi l’ensemble des cinq Écoles françaises à l’étranger, placées sous la tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche : École française d’Athènes, École française de Rome, Institut français d’archéologie orientale du Caire et École française d’Extrême-Orient. En effet, la Casa présente la particularité, depuis sa fondation en 1928, d’accueillir conjointement des artistes (comme le fait la Villa Médicis à Rome) et des chercheurs dans le cadre de l’École des hautes études hispaniques et ibériques (EHEHI).
Depuis quand la photographie est incorporée au centre de création artistique d’une part et de recherche d’autre part ?
X. B : Le premier photographe qui ait été recruté comme membre artiste de la Casa de Velázquez est Max Armengaud pendant l’année 1993-1994. La photographie ne fait pas l’objet d’une recherche particulière au sein de l’EHEHI, elle peut-être abordée et utilisée dans le cadre d’autres recherches, de manière ponctuelle.
La Casa de Velázquez a-t-elle rassemblé une collection particulière depuis l’introduction de la photographie ?
X. B : La Casa de Velázquez dispose d’une collection patrimoniale constituée par les oeuvres que laissent ses artistes lorsqu’ils finissent leur résidence. Les photographes, à l’instar des autres artistes ont donc, depuis cette date (1994) ont laissé des oeuvres à la Casa de Velázquez qui enrichissent notre fond. Celles-ci se sont donc intégrées dans notre collection de façon naturelle parmi les autres œuvres (tableaux, gravures, sculptures, films, enregistrements…) et sont répertoriées comme photographies dans notre inventaire.
Comment se concrétise la photographie dans le centre de création artistique ?
X. B : La Casa de Velázquez – Académie de France à Madrid est un centre de création pluridisciplinaire où les photographes côtoient des peintres, des graveurs, des architectes, des compositeurs, des réalisateurs… C’est la singularité de cette résidence. Pour ce qui concerne les installations nous disposons d’un laboratoire argentique et d’un studio modeste. De façon plus générale la photographie dans un centre de création épouse les mêmes pratiques qu’ailleurs. Ce sont les artistes, plasticiens ou photographes qui en déclinent les usages suivant les modalités techniques et formelles qui sont les leurs. Certains utilisent l’argentique, d’autres le numérique, mènent un travail de type documentaire ou au contraire composent leur photographies en studio à partir d’objets mis en scène. Les photographes sont sélectionnés pour réaliser un projet en lien avec la Péninsule ibérique et arrivent donc en Espagne avec ce projet bien défini. L’intérêt de la résidence est son contexte qui leur permet de le développer dans des conditions idéales en y consacrant les moyens et le temps nécessaires. Ils peuvent ainsi appréhender de la façon la plus libre un territoire singulier, la langue, une culture et une histoire, avec cette proximité des autres pratiques artistiques et aussi scientifiques grâce aux chercheurs en sciences humaines et sociales qui, par le biais de l’EHEHI, fréquentent l’établissement.
Pour le centre de recherche ?
X. B : Il n’existe pas à la Casa d’études de recherches spécifiques à la photographie, celles-ci s’insèrent parmi les autres domaines de l’École de Hautes Études Hispaniques et Ibériques, qui est la composante scientifique de la maison. Les artistes et les chercheurs partagent les lieux et parfois des collaborations se créent. Par exemple cette année un groupe d’artistes et de chercheurs travaille conjointement sur une thématique liée à l’immigration. Des collaborations éditoriales entre chercheurs et artistes se sont créées dans le passé comme l’édition du livre Calle del Barco 13, regard croisé de la photographe Aurélia Frey et de Nelly Labère ou cette année encore entre la plasticienne Charlotte Massip et Cécile Vincent-Cassy. Ces échanges ponctuels se font au fil des rencontres, de manière naturelle et ils sont sans doute amenés à se reproduire.
La Casa de Velázquez est présente à PHoto España cette année avec l’exposition « La sombra del viento » qui réunit les artistes Anne-Lise Broyer / Édouard Decam / Álvaro Díaz Palacios / Jorge Fuembuena / Magali Lambert / Marie Sommer / Jean-François Spricigo du 6 juin au 14 juillet 2013, depuis quand La Casa de Velázquez participe-t-elle à PHE ?
X. B : La Casa de Velázquez participe depuis 2012 (dans la galerie Dionis Bennassar à l’époque car nous étions fermés pour cause de travaux) à PHOTOESPANA.
Quel est le programme de la photographie en expositions temporaires en 2013 ? Quelle perspectives donnez-vous à la photographie d’ici 2020 ?
X. B : La Casa de Velázquez est un centre de création pour les artistes et pas un lieu de diffusion artistique. Les manifestations que nous organisons sont exceptionnelles et se font dans le cadre de la politique que nous menons en faveur des artistes. Cette année les cinq photographes membresde l’Académie de France à Madrid ont participé à une exposition collective dans la Galerie du Dix de l’Institut français d’Espagne à Madrid, espace magnifique situé au coeur de la capitale, dédié à la photographie et dans un quartier où se trouvent d’importantes galeries. Nos photographes participent également à Itinerancia 2013, exposition collective annuelle qu’on peut visiter actuellement à la Casa de Velázquez et qu’on pourra découvrir à Paris à l’Espace Évolution Pierre Cardin du 21 au 30 novembre 2014.
Pour ce qui concerne les perspectives, la photographie se porte bien au vu du nombre des candidats et de la qualité des projets. Ces dernières années la photographie est la discipline qui a connu le plus fort essort dans le nombre de candidats et de membres recrutés. Il est vrai qu’elle est employée aussi par certains plasticiens parmi d’autres médiums mais le nombre des photographes dans les dernières promotions est majoritaire. L’intérêt et l’effort que nous accordons pour des expositions comme celle de PHOTOESPANA vient aussi de cette donnée.
Propos recueillis par Lola Fabry