«… dans un cliché photographique, nous pouvons fixer le visage d’une personne avec une intensité et un intimité normalement réservées aux moments d’extrême émotion – comme le premier regard sur quelqu’un avec qui l’on passera peut-être la nuit ou le dernier regard sur celui ou celle que l’on aime… »
Adam Gopnik. « The Art world : Lost and Found« , The New Yorker, 20 février 1989.
« Souvenirs volés » est un travail sur la mémoire, il se construit à partir d’images anonymes que l’artiste s’est réappropriées dans l’optique de recréer une mémoire factice de souvenirs empruntés à d’autres.
La quasi-intégralité des photographies a été glanée à Berlin. Il s’agit de quelques centaines d’images provenant d’albums de famille que l’artiste a soigneusement sélectionnées, classées, ordonnées, non pas dans une démarche documentaliste mais avec la volonté de capturer des instants de vie, de simples moments d’intimité, souvent banals, faisant référence à un passé proche qui nous renvoie au moment présent et de facto à nos propres interrogations sur la mémoire et la mort.
Boltanski disait : «… la photographie capte un moment de vie et devient sa mort sur un support papier lui-même périssable… »
Carmen Arrabal falsifie, manipule, détourne l’image en substituant au visage des protagonistes ceux de contemporains plus ou moins proches, tout en gardant la scène originelle intacte.
Contrairement à ses précédents travaux, « Souvenirs volés » se démarque par ses petits formats tant l’intention ici est de préserver l’intimité.
Le projet s’articule autour de 3 types d’images :
– «souvenirs volés» s’inscrit dans un processus de réappropriation de la photo de famille.
– «espaces vides» met en scène des lieux (intérieurs ou extérieurs) dénués de présence humaine
– et enfin « images perdues » rend visible l’empreinte du temps sur la mémoire à partir de clichés abîmés.
L’installation nous plonge au coeur même du « cocon familial » et se joue du rapport de force déconstruction/reconstruction de la réalité. Les personnes, les lieux, les vides…, tous se mélangent, s’entremêlent échappant à toute logique temporelle. Comme c’est le cas de la mémoire, les souvenirs ne jaillissent pas suivant un ordre établi mais plutôt suivant une ligne émotionnelle.
Yoann Kaplan
Souvenirs Volés – Carmen Arrabal
Exposition du 15 novembre 2012 au 2 Janvier 2013
Galerie Lina Davidov
210 Bd Saint-Germain
75007 Paris
France
Tel : 01 45 48 99 87